A nos Frères amérindiens du Canada (Tribu des Algonquins)
Grand-Mère toi qui chante entre les branches du bouleau blanc,
Dis-moi pourquoi je ne peux me rappeler ton visage ?
Dis-moi comment étaient tes mains, comment remuaient tes lèvres
Quand tu berçais le fruit de ta joie en imitant le vent ?
Grand Père dis-moi comment c’était le Pays de nos ancêtres,
Comment c’était de courir libre dans les bois, de nager nu dans la rivière
Quand l’été revenait sur les prairies en fleurs ?
Dis à mon cœur, ce cœur qui battait en toi,
Quand à cheval tu parcourais, noble et fier, la forêts des ramures ;
Quand ton peuple n’obéissait qu’a à sa loi et celle-ci à la nature ?
Et vous mon Père et ma Mère, je vous revois
Dans vos haillons de honte et d’effroi…
Je vois vos larmes répondant aux miennes
Quand le car des blanc nous emmena au pensionnat !…
Là-bas on m’enseigna la langue qui ne sait rien
De la lune et des étoiles, qui ne sait pas que la Terre est une Mère
Et que nous sommes les enfants qu’elle tient dans ses bras…
Là-bas on vous meurtrit les doigts quand les lèvres se rappellent
Les mots d’autrefois…
Là-bas des hommes et des femmes qui se disent avoir la foi,
Croire en un dieu de bonté et d’amour,
Font vivre, jour après jour, à des enfants, un long et ignoble chemin de croix !
Où êtes vous, en quel pays inconnu et sauvage, en quelle contrée où ne soit l’esclavage ?
Dites-moi, dites à l’orpheline de votre sang, de votre voix
Où vos âmes ont-elles trouvé consolation
Sans avoir à dire pardon pour des péchés qui ne la concerne pas ?
Pour les blancs nous n’avons d’existence…
Ils nous dénient la vie ; nous couvre d’indifférence…
Ils ont tué la mémoire et coupé nos racines ;
Nous sommes sans sève dans l’aubier de croissance…
Ils nous ont tout volé, nos parents, notre enfance ;
Il ont mis du poison dans l’eau pure d’innocence
Et mes frères se suicident ou croupissent en prison…
Je suis un être vivant, mais qui n’a plus de nom !…
Grand Père, je t’en prie fais briller ton étoile
Et toi Grand-Mère, chante moi ta chanson ;
Je ne sais plus mener mes pas vers le noir horizon ;
La mort tisse pour nous une dernière toile !
10 12 2012