Aimer à perte de vue ! poème mai 2015 Bran du
Aimer à perte de vue... Bran du 26 05 2015
S'estompent les formes précises et apparaissent des masses sans frontière distincte...
J'ai quitté le plein du jour, ses ébats, ses repères, ses mille variations qui font et forment une « amimation » en tout être et en toute matière...
Ce n'est pas la nuit pour autant, non, je perçois encore, du vivant, les mouvements, les façons qu'il à de se déployer dans l'espace, de se poser, de s'élancer...
Le monde dans lequel je suis, s'opacifie ; je suis dedans, me déplaçant en tâtonnant....de là à ici...
Je suis comme un bois flotté qui ne coule pas, mais qui va comme il peut parmi les ondes...
C'est le courant du temps et celui de mon sang qui en moi vagabondent avec, parfois, leur source diluée dans l'océan...
Jadis, mon regard allait loin, s'élevait très haut, puisait au plus profond comme au plus lointain....
Soleil et lune menaient leurs rondes et il m'arrivait de tournoyer avec eux...
Maintenant, le danseur que je fut se tient à l'écart de leurs chorégraphies...
Je tente cependant de sauver du noir quelques images de clarté, de celles qu'une belle lumière inonde et ce, avant que mes volets ne soient définitivement fermés !...
Je sais, c'est une étape, un prélude, un palier, un seuil, avant que le rideau ne se ferme brutalement ou dans le grincement progressif d'un rouage usé...
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Ce que je voyais , cela qui se meut, cela qui est fixé à demeure, mais auquel les variations du ciel donnent une forme de vie, il me faudra l'entendre, l'écouter seulement, le percevoir, l'imaginer à nouveau, le revisiter de mémoire...
Il me faudra parfois y porter mes doigts, ma main, mon torse, mes lèvres, mon corps pour établir ce contact sans lequel je serais définitivement « hors vie » !...
...
Mon rapport au monde sera restreint, amputé de cette part qui me liait à lui....
Je serais emmuré en quelque sorte, mais sans portes, sans verrous ni barreaux !
Que me restera-t-il alors ?
Me faudra-t-il errer sans fin en un long couloir, dans le silence feutré d'un interminable corridor ?...
Je sais, je n'ai pas toucher le bout...
Toucher, c'est ce qui me reste...
Cela est encore presque vierge, si peu utilisé....
Toucher, être touché... Cela ouvre un continent de possibilité !
On ne touche jamais aussi bien que les yeux fermés n'est-ce pas !
Essayez ! Avec plus d'attention et d'intention cette fois !
Vous verrez !
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Quelque chose au fond de moi me dit
que si un tel scénario devait se produire...
Si je devais soudainement ou peu à peu « basculer » du monde clair vers le monde obscure...
Il ne me restera plus, pour avenir et devenir, que d'aimer
à perte de vue !
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Notes :
Ceux et celles qui deviennent « aveugles » par maladie ou accident doivent faire preuve de créativité et de vie et transformer leur rapport, leur relation, à l'autre, aux autres, au « dehors »....
Ils doivent passer, du fait de cette cécité, de la vision au toucher en développant ce sens et se possibilités...
Ce n'est pas parce que l'on ne voit plus qu'on ne souhaite plus être vu... C'est là ce qui sous-tend en partie le film de Eskil Vogt »Blind » qui rend compte à sa façon de cela...
Il nous fait toucher du bout des doigts du cœur et des sens disponibles, l'importance exagérée de l'apparence dans nos vies...
« ...Nous sommes assaillis en permanence d'images venant de la publicité, de la télévision et d'internet en général. Il n'y a plus de fraîcheur » à nos yeux, les choses sont banales et usées avant même d'être expérimentées. Les médias prédominent le visuel mais une chose n'a pas encore été optimisée de la sorte et demeure réellement personnelle comme sentiment et émotion : le toucher. »
Eskil Vogt