ALAUDA OU LE BARDI DU CREPUSCULE BRAN DU 2016 29 11 NOV
Bardi du Crépuscule... Bran du 1998
Alauda ! Alauda !
Que monte mon chant vers le sommet du monde, qu'il soit, neige sur neige, sur le pentu du monde....
Fumée joyeuse du chant qui danse sur lui-même et s'enroule à la flamme du désir...
Sur le mât du jouir s'élève l'ignée torsade en laquelle s'enroulent les amants de la vie..
Alauda ! Alauda !
Clair le chant ; clair et arrondi comme une pierre d'eau vive...
Ruisselet du chant qui, pour l'océan, porte sel sur la langue...
Etoile d'eau que le chant au miroir des nuits...
Puisse la lune s'y baigner, s'éjouir en ses ondes...
Ardent est le lierre qui gagne les hauteurs et consentant, l'Arbre, aux chants de nos oiseaux...
Les lèvres sont d'étincelles qui boutent feu aux mots, lesquels enflamment le poème qui brûle sous la peau...
Il est tant à attendre sous le couvert des cendres !...
Un feu couve dans la poitrine des Sages ;
Le premier d'entre eux nous a transmis la braise...
Il suffira d'un souffle puisé dans la mémoire pour qu'un foyer nouveau embrase l'antre de la mort d'une rouge fournaise...
Souffle, souffle sur le monde levant vagues de vie...
Tout, tout est naissance s'en venant par le chemin du jour...
Tout prend forme entre l'air et le feu, l'océan et l'argile, la sève et l'écume....
Lumière fécondant les ténèbres, ensemençant l'humus, fertilisant le terreau...
Etreintes invisibles des lianes de l'Amour...
De la jument naît le poulain lequel se fait étalon et couvre de son poitrail les reins de la pouliche...
Cela nous le savons, mais qui dira la Semence enclose dans la semence emblavant les terres de l'aurore ?...
Qui , dans la germination des cycles et des rondes d'existence ?...
Certes, tout ce qui s'en vient s'en retourne, de spire en spire, de silence en silence...
J'entends une berceuse aux franges de l'Univers...
Ciel rouge du sang d'une mémoire lacérée par le mensonge...
Le ciel est un autel pour les âmes des êtres qui sont morts libres et debout...
Pour eux la nuit allume ses luminaires...
La dignité aussi à ses étoiles...
Je prédis des temps qui ne me conviendront pas :
Temps d'inversion des valeurs ; lumières factices et lueurs d'artifice au chevet d'un monde agonisant...
Diplômes et brevets pour les professionnels du mensonge....
Gloire et honneur pour les êtres de cruauté et d'orgueil...
La liberté tenue en laisse et à la longe...
Couche déserte dans le lit véritable de l'Amour...
Poésie prostituée par les marchands d'affiche...
Paroles sans feux ni flamme, mais que cendre dispersée au vent...
Monde sans nuance, sans médiation, apologie de l'exubérance, éloge de l'intolérance, excès à profusion...
La vie est devenue malversation, contrefaçon, masquée par l'arrogance, grimée par l'illusion...
Sève et résine coulent des arbres blessés par la morsure d'acier des mâchoires financières...
Eventrée est la Mère, souillée et profanée, affouillée en ses entrailles par les tenants de l'or et de l'argent...
Braderie et solderie des sentiments de paix, de joie et d'équité ; art de la décadence et de la dégénérescence,
enfouissement de la mort dans les fosses de l'oubli...
Culte du moi au détriment du soi, musellement de la conscience...
Parodie d'existence que cela, vaste bouffonnerie...
C'est le monde que je vois, c'est là son profil et cela ne me plaît pas...
L'humanité est un mot en perdition ; orphelin d'un Verbe d'Amour qui seul peut lui restituer son Anima et son Essence...
Gris, le ciel et terne, l'horizon....
Long hiver de ténèbres amoncelées....
Mais lois aussi des cycles où toute fin annonce un renouvellement à venir une fois l'épuisement mené à terme...
Lors demeurer dans le gué, la pensée entre deux rives et faire de son corps, de son obstinée espérance, un pont, une passerelle, pour enjamber les peurs et les doutes et l'abysse d'ignorance...
Alauda ! Alauda ! Pousser au plus haut ses ailes dans le ciel !...
Il est des branches mortes promises aux feux de joie !....
Alauda ! Alauda !
(Alauda est le nom en gaulois de l'alouette qui pousse son chant au plus haut de la verticalité du ciel.)