Les dits du corbeau noir

DE L'AMOUR TEXTE POETIQUE INSPIRE DES DESSINS DE LORENZO MATTOTTI 2016 BRAN DU 23 12 DEC

 

De l'AMOUR.... Bran du              23 12 2016

 

A partir du livret de dessins de Lorenzo Mattotti : LA STANZA

Logos éditeur

 

 

 

Au dehors :

 

Un héron hobereau à refait séjour sur l'îlot de l'étang protégé par des arbustes qui font écran au vent du Nordé...

 

Il se tient longuement dans une verticalité sereine et paisible, à peine troublé par les rumeurs urbaines qui l'entourent...

 

Il est de connivence avec le jeune soleil et le couvert des étoiles...

 

Ses paupières s'ouvrent et se ferment sur le Grand Livre de l'Univers...

 

 

La Bretagne crachine un ciel de cendre...

L'hiver s'installe dans la douceur habituelle des Côtes d'Armor...

 

Les chats restent au chaud, entourent le temps dans le cercle de leur semi somnolence...

 

Les Cormorans et le martin-pêcheur vaquent à leur habitudes, retracent fidèlement la trajectoire de leur quotidien....

 

 

 

Au dedans :

 

Ils sont deux, dans une pièce blanche et nue...

Ils ne sont pas nus eux-mêmes bien que leur esprit et leur pensées soient, pour l'heure, en train de se dévêtir progressivement de toute peur, de toute appréhension et restriction...

 

Sur la table de chevet est posé un verre où des soucis jaunes et oranges se sourient....

Ils se sourient aussi et cela fait comme un léger friselis à la surface de l'instant...

 

Le lit est des plus simples, assez large, ferme et doux à la fois...

Un édredon et deux oreillers avec des feuilles bleus sur un fond blanc...

 

Ils sont, pour le moment, assis ; l'un à un bord et l'autre à une autre extrémité... Ils se font face... Mais déjà circulent, en transversales, des ondes d'écoute, d'attention, d'entendement...

 

 

 

L'espace qui les sépare s'appelle « Connivence ». Parfois il change de nom et devient « complicité »...

 

Cela qui se tient encore dans la distance est une respiration calme, posée, mais on devine déjà quelques braises ronronnant sous la cendre...

 

Un oiseau, je ne sais lequel, met sous une grande enveloppe, un baiser... On se doute quelque peu de sa destination !....

 

 

La présence ne se goûte vraiment que dans une certaine distanciation et à travers la douce fièvre des progressifs rapprochements...

 

 

 

Aller vers l'autre... C'est une très beau voyage, c'est un cheminement, une navigation, une île vierge et sauvage vers laquelle s'embarquent les plus vives et sincères émotions...

 

 

C'est alors que l'on comprend que le silence est un langage, qu'il a de subtiles articulations... Les gestes simples se parent d'éloquence et s'exonèrent du bavardage...

 

 

Elle à une jupe très courte passée sur un collant et un polo à petite manche...

Lui, un débardeur et un « jean » pour pantalon lequel moule le parfait arrondi de ses hanches...

 

Elle n'a ni montre, ni collier, ni bijoux d'ailleurs, si ce n'est celui qui brille dans l'écrin de son cœur et dans le rouge velours de son sang...

 

Il ont, par ailleurs, l'âge de l'Amour et cela suffit à tout entendement, à toute précision...

 

 

 

Ils savent tous deux que ce jour, à lui seul, vaut tous les dimanches, ceux des noces et ceux de l'heureuse enfance...

 

Ils savent marier la joie, la découverte et l'innocence...

Ils savent convier les sens et allumer leurs feux et faire flamber, conjointement, le bois tendre de leurs yeux...

 

 

Ils sont allongés maintenant laissant, entre eux, un estran comme il en est, entre le flot et le rivage...

 

Ils savent que la marée s'en viendra aux grèves lisses de l'attente, que ruisselleront les rouleaux de force, de fougue et de fureur...

 

Cependant, ils ne craignent pas la submersion ni la houle qui fracasse. Ils ne tremblent pas plus que le coquillage qu'ils sont en leur corps devenu sonore, à l'unisson de la Mer qui les enlace...

 

 

Ils demeurent là où tout passe...


Ils ont, avec grande patience, monté, de l'instant, l'écheveau, la tapisserie de haute lice...

La chaîne, ils l'ont assemblé sur la trame de ce baiser envoyé par l'Oiseau...

 

Ils ont tressé le brin de nuit, le brin de jour, le brin d'Amour..

Ils sont étoffe maintenant, écharpe rouge à mettre au cou du vent sans demeure ni ancrage...

 

 

L'espace et le temps ; voici leur éternel séjour...

 

Rien de furtif, rien de précipité, mais cette éternité qui réside, qui a foyer, dans la densité et l'intensité des véritables et ardents sentiments que se prodiguent, mutuellement, les aimants...

 

 

 

En amont de la reliance, il y avait quatre dimensions.

Il n'en est plus qu'une à présent ; le présent étant devenu le don !...

(Celui du Feu, celui de l'Eau, qui ensemble, fomentent la plus pure et la plus vive des alliances.)...

 

 

Au carrefour de leur être, en l'entrecroisement de leurs jambes, il n'est plus qu'une seule direction ; une étoile lui donne son nom...

 

 

L'embrassement se fait embrasement...

La danse se fait circonvolution...

Il y a de la rosée sur les tempes de ce printemps qui déjà se veut moisson...

 

 

Jupe et bas, slip et pantalon, gisent sur le sol, sur le policé de la plage ; la peur a fait naufrage quand le désir a hissé son pavillon...

 

Comme on porte un fruit pulpeux à ses lèvres, il a pris son sein dans la couronne des siennes...

Puis, il l'a façonné de ses mains, d'Amour, pleines...

Ainsi le pain sorti du four...
Ainsi aussi, quand lève la farine d'Amour...

 

 

Depuis, ils se contemplent comme la nuit venant contemple le dévêtu du jour...

 

 

Ils adoptent mille positions, comme galets roulés ils sont,

brassés dans l'équinoxe de leur jouissance...

 

 

Ils n'ont pas dit un mot, pas un seul... Mais le ciel et la terre ont entendu la fauve clameur du vivant de leur poème....



23/12/2016