Les dits du corbeau noir

Coucher de soleil sur la Côte de Granit Rose

Photo Bran Du

Réflexion Bran du Mars 2021

De la solitude

« La pire souffrance est dans la solitude qui l'accompagne »

A Malraux

Je vis seul, ce qui, est assez banal et ordinaire quand 3 à 4 millions de vos semblables connaissent et vivent, assez mal, un même état...

Il est vrai par ailleurs que nous venons au monde « seul » et en repartirons de même ; venant du plus lointain de l'infini nous retournerons vers celui-ci avec ou non quelques conceptions voire espérances de « l'au-delà » une fois la « frontière » franchie....

La solitude est sans doute la plus fidèle des présences et son attachement à votre personne est exemplaire en tout point....

Ainsi, elle ne vous fera jamais reproche de l'avoir, quelque temps délaissée, elle sait par ailleurs que vous ne tarderez pas à la rejoindre de nouveau un jour, une nuit ou l'autre...

Esseulé donc je suis, non pas dans le fait que j'ai la chance d'avoir de très nombreux ami(e)s, bien au contraire et j'en suis fort heureux, mais parce que l'ensemble de ceux-ci et leurs qualités spécifiques ne sauraient combler, par leur présence sporadique chaleureuse et réconfortante, l'immense vide qui m'entoure et m'enserre au quotidien de mon existence et dans l'intimité de celle-ci...

Je connais et j'apprécie cependant cette « solitude » pour les bienfaits qu'elle octroie quand je la recherche à des fins d'apaisement ou de créativité, quand elle permet une distanciation sereine avec diverses turbulences existentielles...

Etre « seul avec soi-même » peut être une forme de délectation, de jouissance même, mais ne saurait faire oublier les douloureux revers de cette médaille...

L'animal « humain » que je suis à, certes, grand besoin de se relier socialement aux autres afin par exemple d'apprendre à se connaître, à « s'identifier » à travers leurs miroirs et à se confronter avec sens et intelligence à la fois à un différentiel source de complémentarité et à des convergences d'entendement et d'attitudes rassurantes et confortantes sur divers plans...

Mais, car il y a un « mais », il y a « relation et relation » et celle-ci , qui constitue un acte majeur dans notre vie avec le fait de faire, d'entreprendre, de réaliser, de créer, d'offrir, de partager, d'échanger, de rencontrer et de découvrir, comporte divers niveaux, plans et stades en terme de densité et d'intensité des affects, plus ou moins réciproque, plus ou moins antagonistes ou neutres qui la composent...

Bien que,dans de nombreux domaines plus ou moins ignorés ou rejetés, nous soyons, en fait et réellement, « inter-reliés » et interdépendants des uns et des autres et de tout le vivant et de l'Univers qui nous entoure, nous n'avons pas encore vraiment saisi toute l'importance qu'il y aurait à éduquer tous et chacun sur l'art du langage et de la communication ;

(un apprentissage pourtant essentiel, fondamental, élémentaire qui fait gravement défaut tout au long de la chaîne éducative (famille, école, université...)...

Ceci ajouté à l'absence d'enseignements sur notre nature biologique, ce qui détermine nos agissements, nos actions et réactions, nos attitudes et comportements face à la vie qui se présente à nous...

Cela fait déjà une somme conséquente d’handicaps majeurs et fortement préjudiciables pour assumer au mieux notre « incarnation » ici-bas !....

Si la solitude est un temps et un espace s'avérant parfois indispensable dans la relation intime et profonde avec soi-même, elle n'oblitère pas le besoin biologique d'être en relation avec d'autres individus que nous-mêmes...(Quand nous acceptons de faire « communauté » avec les autres et de partager un commun et bienveillant sentiment d'appartenance avec eux sans que cela soit coercitif bien entendu.)...

On peut vivre dans une alternance entre être seul et plus ou moins accompagné dans une proximité complice, épanouissante et fortifiante, mais on peut aussi « mourir » de solitude !...

(A moins d'avoir fait l'audacieux et délicat choix d'épouser celle-ci et de se couper du monde humain en se retirant dans une cellule de son cœur et dans les geôles de son intelligence. Ce que peuvent faire quelques éléments d'exception en tant qu'anachorète, moine, ou ermite par exemple.)...

(Une nuance s'impose toutefois ici quand on pense aux « hommes et aux femmes « aux semelles de vent » de Chine, du Japon, de la Corée, du Bengale et d'ailleurs, qui vivent, en plénitude, une vie retirée dans un ermitage bordé de nature et de simplicité instaurant un dialogue quotidien et éminemment poétique avec la lune, le soleil et les étoiles et tous les règnes bruissants ou silencieux qui les entourent...

Ils ont de rares contact avec la gente humaine, mais sont fortement heureux de boire le thé avec un autre vagabond de la vie en déplacement dans son rêve et dans ses aspirations.)...

Ainsi la solitude comporte deux faces réversibles et interchangeables en intensité de douleur ou de jouissance....

Il est sans doute rien de pire qu'une "solitude" très mal accompagnée !...

Si je goûte avec délectation les instant de « solitude » qui sont de ceux que je me suis savoureusement et volontairement offerts, je connais, au revers de cela, tout le pesant d'un solitude imposée et installée à demeure et ce poids m'est totalement insupportable et plus poignant à gérer que la maladie et les angoisses qu'elle génère, les diminutions de capacité qu'elle engendre, l'esseulement dans une souffrance qui vous étreint sans nul secours et aide extérieure, sans présence aimante et réconfortante à vos côtés...

(Les personnes qui nous ont quitté pendant cette pandémie sans avoir pu, lors de leur départ, être entourées de leur famille, de leurs proches, abandonnées en quelque sorte à leur dramatique sort donne, peut donner, une idée de ce qu'une solitude extrême peut produire tant pour la personne considérée que pour son entourage affectif !)

Et, dans cette même douloureuse situation, qui engendre des confinements généralisés ou partiels plus ou moins prolongés ou répétés, le phénomène « inédit » d'enfermement chez soi, de coupure relationnelle, amène à un sentiment d'isolement bordé d'informations anxiogènes et angoissantes qui altèrent gravement le psychisme, augmentent, notamment chez les jeunes, le taux désastreux de suicides, et plonge la société dans une forme de marasme sociétal agité de fortes tensions menant de la résignation, de l'acceptation, aux plus fortes contestations, dérives et colères...

Porter attention et aide aux autres, suivre et accompagner les événements, apporter son modeste concours dans la revitalisation et la redynamisation de nos frères et sœurs en humanité, avoir souci de l'environnement, du sort des autres règnes ; de la biosphère et des écosystèmes comme de la biodiversité, incarner et transmettre et animer un corpus de sagesses, des outils et des méthodes appropriés à un mieux être, à un mieux vivre, individuel et communautaire occupe grandement l'individu que je suis et satisfait amplement celui-ci dans sa fonction altruiste, spirituelle, culturelle, sociale et philosophique...

Mais, le Druide n'en est pas moins homme et ce dernier continu d'œuvrer du fait qu'il y a en lui ce Druide doté de facultés et de capacités fortifiantes et résilientes, sinon je pense que le bonhomme se serait écroulé depuis belle lurette !

La faille essentielle résidant dans l'absence auprès de lui d'un « Féminin » apporteur de cette tendresse qui demeure l'expression majeure et indicible de tout sentiment « amoureux »...

Le « partage » magique, alchimique et sacré, l'offrande, la célébration, entre le Féminin et le Masculin sont l'Acte suprême de la Vie et de l'existence...

C'est là pour l'homme comme pour le Druide, la source d'essentialité existentielle sans laquelle il ne peut, à lui seul ou avec de forts épuisements, répandre et faire s'écouler de lui-même et sans compter un flux de vie, un flot d'Amour, un ruissellement de dons, de solidarité et de générosités...

Toute fontaine, généreuse, guérisseuse, bienveillante... ne peut donner que ce qu'elle reçoit elle-même de la Source de Tout Amour, une Source dont la Femme est la Gardienne depuis la nuit des temps !...

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