DECES DE KENNETH WHITE ECRIVAIN POETE ESSAYSTE... 2023 BRAN DU EXTRAITS 28 08 AOUT
DOSSIER KENETH WHITE : documents extraits AOUT 2023
Bran Du
Source : Wikypédia...
Kenneth WHITE 13 08 2023
Nous apprenons nous ses amis lointains le départ pour le Gwenved (Le Monde Blanc de la pure Lumière) du géopoète écossais Kenneth White en sa demeure de Trébeurden où il incarnait l'homme des rivages, des gués et des lisières...
Il avait en son temps marché sur les traces de Bashô et de ses kaïku là-bas dans le Nord profond du Japon et convoqué entre autres « penseurs de « l'Esprit » Victor Segalen, Rimbaud, André Breton, St John Perse, Nietzsche, Henry David Thoreau, Gilles Deleuze, Elisée Reclus, Hohuzaï, Spinoza, Joseph Delteil, Heidegger, Jack Kerouac...
« Le nouveau territoire que l'on propose, c'est celui de la géopoétique, le "champ du grand travail", un travail qui nous invite à aller dehors, à l'affût des signes du vent, de la terre, des vagues, de notre environnement. »
Ce qu'en dit la « critique » :
(Né en Écosse, installé en France depuis 1967, Kenneth White se dit Écossais d’origine, Français d’adoption, Européen d’esprit, mondial d’inspiration.
Auteur d’une œuvre à multiples facettes, il a été marqué profondément par deux choses : ce qu’il a appelé les « fournaises de la ville » et le « monde blanc » des espaces naturels. D’un côté Glasgow, grand port international et ancien haut lieu de la révolution industrielle, où il a passé les premières années de sa vie, dans un milieu ouvrier. De l’autre le village sur la côte atlantique de l’Écosse, où son père, signaleur des chemins de fer, s’est fait muter pour installer sa famille dans un environnement plus favorable.
Le jeune Kenneth est très tôt attiré par la nature qui l’entoure, parcourant le rivage et « chamanisant » tout seul sur les landes et dans les bois de bouleaux de l’arrière-pays. Adolescent, tout en continuant à arpenter rivage et landes, il devient un lecteur vorace.
Il s’initie à la géologie, à l’ornithologie, à l’archéologie de son territoire, et lit des auteurs proches de la nature, tels que Henry Thoreau, Gilbert White, John Muir et John Ruskin. Plus tard, étudiant à l’université de Glasgow, où il est inscrit en langues anciennes, langues modernes (français et allemand) et philosophie, il se plonge dans l’histoire des villes et des civilisations, à travers les grands historiens, et se délecte de lectures citadines allant de Baudelaire à Dostoïevski qui font écho à sa propre expérience sur les trottoirs de sa ville natale.
Étudiant très individualiste, White interrompt le cursus normal de ses études pour aller passer une année en Allemagne, à Munich. Mais, après son retour, il a de plus en plus les yeux tournés vers la France, convaincu qu’avaient eu lieu en France des avancées de l’esprit que ne connaissaient ni les pays anglo-saxons, ni l’Allemagne d’après-guerre.
De sorte que, dès ses diplômes obtenus, muni d’une bourse d’études, il part, non pas pour Oxford ou Cambridge, mais, sans hésitation aucune, pour Paris. Et s’il a commencé à écrire à Glasgow, c’est à Paris qu’il publie ses premiers écrits, tôt remarqués par, entre autres, André Breton, qui y reconnaît un « haut accent de nouveauté ».
Ce sera le début d’une œuvre complexe, écrite en partie en anglais et en partie en français, qui s’exprime à la fois par le récit autobiographique (voyages, vie en divers lieux), l’essai et le poème. Quant au style, il se veut toujours à la fois naturel et accessible, sans afféterie, sans maniérisme, sans jargon intellectualiste.
L’œuvre de White dans son ensemble est caractérisée par un va-et-vient entre l’espace fermé des villes et l’espace ouvert non codé. De la partie citadine de ses origines sont nées une critique sociale et culturelle radicale et la recherche d’éléments essentiels puisés à la fois dans les cultures du monde et dans l’expérience directe des paysages.
C’est tout cela qui est impliqué dans ce qu’il appelle le nomadisme intellectuel. De son expérience précoce et prolongée de la nature est née la conviction que, sans contact avec le non-humain, la vie humaine s’étiole, se détériore. C’est cela qui a donné lieu au deuxième grand thème général de cette œuvre, à savoir, la géopoétique.
Ajoutons pour compléter cette esquisse préliminaire qu’à son activité centrale d’écrivain, White a toujours joint un activisme qui, en plus de ses fonctions d’enseignant dans plusieurs universités en Écosse et en France (il a toujours considéré son enseignement comme la prolongation orale de son travail d’écrivain), l’a amené à créer ici ou là des groupes de réflexion et d’action, dont l’Institut international de géopoétique, fondé en 1989, peut être considéré comme l’aboutissement.
Les livres de Kenneth White, écrits tantôt en français, tantôt en anglais (les livres écrits en anglais existent pour la plupart en version française), ont été traduits dans diverses langues : allemand, italien, espagnol, portugais, néerlandais, bulgare, serbo-croate, macédonien, polonais, turc, russe.)
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DOSSIER KENETH WHITE : documents extraits AOUT 2023
Bran Du
Source : Wikypédia...
Et, pour une part, l'étude très fouillée faite par Olivier Penot-Lacassagne...
Ce qu'ils nous disent de l'auteur, de l'écrivain, du poète et de l'essayiste :
Kenneth White est le chantre de « l'intelligence sensible » et de la « sensibilité intelligente. »
« A l'heure de la planétarisation d'une certaine médiocrité, l'un d'entre nous se lève et, tournant le dos, fort d'un véritable savoir, s'éloigne et impose une méthode de pensée, une présence à soi et au monde qui anticipent sur un véritable art de vivre. »...
Philippe Mogentale (Revue des Belles lettres Genève)
«De son expérience précoce et prolongée de la nature est née la conviction que, sans contact avec le non-humain, la vie humaine s'étiole, se détériore... »
« Il lie le lointain et le proche, l'orient et l'Occident, la poésie et la vie quotidienne. Kenneth aux semelles de vent et au cerveau incandescent ! »
André Laude (Les Nouvelles littéraires)
« Kenneth White tente de se frayer un passage au-delà de tout esthétisme et de tout intellectualisme vers une sorte de conscience sensible élargie d'un monde que notre civilisation réduit de plus en plus à de vulgaires artefacts. »
Georges Guilain (La Quinzaine littéraire)
« Avec K White, on a toujours été dans la quête initiatique, dans la recherche de ce qu'il appelait « le monde blanc », « une figure du dehors » pour atteindre l'expression poétique maximale du monde. »
« Il s'agit pour K White de comprendre comment les Primordiaux gardaient le contact avec le monde en l'interrogeant. Ce que nous avons perdu depuis longtemps. Le retour au monde est un retour aux coordonnées premières de l'existence ; les éléments, les montagnes, la terre. »
« Dans la perspective des rapports entre Orient et Occident, il construit l’œuvre la plus intéressante de la seconde moitié du XXè siècle. »
Régis Poulet (larevuedesressources.org)
« La singulière puissance de son œuvre, avec ses exigences en apparence contradictoires, mais profondément créatrices, tient à cette quête constamment tournée vers le réel. »
Denys C. de Caprona (Journal de Genève)
Pour Kenneth White, « La culture, c'est un bel espace pour vivre pleinement. »...
Il souhaite « Une poésie brève, concise, pleine de sensations directes... »
Avec Kenneth White le voyage se fait navigation...
« Comment vivre afin de découvrir du réel à chaque pas ? » KW
L'unité vivante d'un monde voilà le motif central de sa démarche...
La nature sera l'inspiration essentielle de K W...
Le désir de K W de pénétrer jusqu'à l'esprit de l'Univers...
Jean Paul Loubes
K W appartiendrait à ce que l'on appelle « une avant garde silencieuse »..... Un « écumeur et arpenteur des rivages, un clochard transcendantal. »...
Le parcours de K White, depuis un demi siècle, se distingue par un retour à l'idée de monde et par un retour au monde...
Régis Poulet
« Kenneth White met en mot, conceptualise, ce qui me semble être une quête qui se répand, d'une nouvelle synthèse vivante, dynamique, complexe, exigeante à la fois pour l'intelligence et pour l'émotion, entre science et poésie du monde. »
Olivier Frérot à propos du Plateau de l'albatros de K White
De nombreux auteurs ont remarqué la prise de distance de Kenneth White entre le Moi et les formes conventionnelles de la poésie. Whiote azttend du travai poérique qu'il p^longe l'être dans une profondeir de l'esprit et qu'il reste relié à la terre. (L'expression du « Moi » n'est pas son affaire.) Christophe Roncalo
Il use d'une langue qui renonce à tout support mythologique ou symbolique... Pas de spiritualisme, pas de dieux, de déesses, pas d'inventions humaines à ce sujet, pas de métaphore...
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Les « dires « de Kenneth White...
« Une théorie ? Oui... Mais toute théorie valable se doit d'être basée sur une pensée fondamentale, d'être liée à une pratique solide et de rester ouverte. »
« Un monde, c'est ce qui émerge du rapport entre l'homme et la terre. Quand ce rapport est sensible, intelligent, complexe, ce monde est monde au sens profond du mot : un bel espace où vivre pleinement. »...
« Pour qu'il y ait culture au sens profond de ce mot, il faut qu'il y ait consensus dans le groupe social à propos de ce qui est considéré comme essentiel. Dans toute culture fondée et vivifiante, on trouve un foyer central... Tout le monde (à des niveaux de discours différents, certes) s'y réfère. »...
« A un moment donné, après de longues années de recherches en histoire et en culture comparée, je me suis demandé s'il existait une chose sur laquelle, au-delà de toutes les différences d'ordre religieux, idéologique , moral et psychologique qui foisonnent et parfois sévissent aujourd'hui, on pouvait – au Nord, au Sud, à l'Est, à l'Ouest – être d'accord.
J'en suis arrivé à l'idée que c'est la Terre même, cette planète étrange et belle, assez rare apparemment dans l'espace galactique, sur laquelle nous essayons tous, mal la plupart du temps, de vivre. »
« Un monde, bien compris,émerge du contact entre l'esprit et la terre. Quand le contact est sensible, intelligent, subtil, on a un monde au sens plein de ce mot, quand le contact est stupide et brutal, on n'a plus de monde, plus de culture, seulement, et de plus en plus, une accumulation d'immonde. »
« La reconnaissance de l'importance d'un rapport direct avec les choses de la nature peut servir de point de départ à une prise de conscience radicale, donc à une politique, à une éducation différentes. »...
« J'ai traversé divers territoires, toujours dans le but d'amplifier mon sens et ma connaissance des choses. Et je continue de le faire, car il ne faut jamais perdre contact entre l'idée et la sensation, la pensée et l'émotion. »
« La pensée ne se sépare pas de la vie vécue et la théorie s'enracine dans le réel... »
« Il ne faut jamais perdre contact entre l'idée et la sensation, la pensée et l'émotion . »
« Le lieu et l'espace sont deux mots clefs. »
« Le champ d'une poésie « post-moderne » telle celle de Thoreau
ne relève ni du moi, ni du mot mais du monde. »
« Une vue renouvelée du monde est portée par « une grammaire de pluie, d'arbre, de pierre. »
La vision d'un « Monde Blanc » où vivre « une expérience de la réalité incandescente. »...
« Le poète est la transparence du lieu dans lequel il vit. »
« Changer les mots, c'est changer les choses. »... Inventer, c'est à la fois « découvrir et créer » en étant fidèle au mouvement par lequel le monde à tout instant peut se révéler autre à nos yeux étonnés...
« L'Origine est toujours présente. C'est un champ d'énergie, un foyer de forces et de formes, pourvoyeuse à la fois de liberté et d'un sens de l'ordre, la source de toute créativité fondée, puissante et rayonnante. »
(K White cherche à comprendre comment les hommes Primordiaux gardaient le contact avec le monde tout en l'interrogeant...Ce que nous avons perdu depuis longtemps. Le retour au monde est un retour aux coordonnées premières de l'existence : les éléments, les montagnes, la Terre... (Régis Poulet)
Essayer d'entrer dans l'espace-temps des possibilités existentielles...
Vivre un être plus intense entre conscience et cosmos...
Entrer dans un espace non répertorié...
Il s'agit toujours d'avancer sur des territoires laissés en blanc sur les cartes... Lieu de l'extrême possibilité...
D'entrer dans un espace non répertorié...
Une écriture, une pensée, en mouvement, en émergence...
Il y a en notre époque une espèce d'anesthésie générale...
Hauts-lieux hanté par leur beauté soudaine, Vivre et arpenter, leur consacrer des textes de célébration ou d'hommages.
Que la matière même soit source et secret en tout art...
Il y a sur terre une correspondance de plus en plus fine entre l'esprit et les choses...
L'essentiel et d'être totalement présent à ce qui est présent.
Vivre un être plus intense, un champ d'extériorité, entre conscience et cosmos...
Il y aune reliance, des échos et résonances entre des lieux semblables....
Le paysage verbal consiste à révéler, à dévoiler la vérité du paysage physique...
Suivre les choses avec le suivi des yeux et l'esprit...
Entre errance et résidence... les lieux visités...
Capter un foisonnement et le mouvement de la Vie..
Un flux blanc méditatif... Les affinités extrêmes...
Retrouver la polyphonie du monde... l'amplitude des choses...
Halte à la mièvrerie. Développer une pensée archipélagique …
Une écriture de l'impulsion et de l'extravagance, une translation d'énergies...
Arpenter le monde et la Vie... l'étoffe de l'existence, la vie de l'esprit... Entre errance et résidence...
La pensée ne se sépare pas de la vie vécue....
Il s'agit de tracer une géographie de l'esprit...
J'adore rechercher les anciennes cultures... Trouver des éléments d'une culture différente... une culture vivante...
Etre en dehors des normes... Œuvrer en vue d'une possible culture universelle...Un monde ouvert sans clôture...
La poésie, la philosophie et la science, voilà l'accord essentiel...
« Le poète est la transparence du lieu dans lequel il vit. »
Aujourd'hui, ce qui concentre notre essentialité, c'est la Terre-Mère...
Le but : créé une poétique plus forte capable de véhiculer une culture... (Une poésie brève, concise, pleines de sensations directes...) (Une vue renouvelée du monde est portée «par une « grammaire de pluie, d'arbre, de pierre »)...
Vivre le lieu et l'espace pour y vivre intensément, pour y vivre l'expérience du monde...
Tout est possible....
Un auteur, pour moi, c'est celui qui augmente le sens et la sensation de vie. Si on a cela en soi on peut aller loin... (Une pensée qui fait vivre...)
Changer les mots, c'est changer les choses... non pas selon l'arbitraire d'une fantaisie coupée de tout rapport au réel, mais en étant fidèle au mouvement par lequel le monde à tout instant peut se révéler autre à nos yeux étonnés.
Il s'agit à la fin de tout réduire au niveau du « thé et du riz », c'est-dire de l'essentiel.
Qu'est-ce qu'un « isolé » (qui sera le plus souvent un exilé) ?
C'est un nomade intellectuel...
L'époque est marquée non seulement par une paresse intellectuelle mais par une espèce d’anesthésie générale, (un monde enfermé dans ses contradictions et ses controverses.). La pratique de l'isolé est celle d'un singulier-pluriel qui dans sa singularité aura rassemblé dans son esprit une grande part de la culture universelle...
les idées, on le sait, se diffusent souvent d'étranges manières, presque clandestinement, à l'insu de ceux qui croient savoir.
Il pouvait y avoir, sur la terre même, une correspondance de plus en plus fine entre l'esprit et les choses.
La dialectique du nomade et du sédentaire est vieille comme le monde. Elle constitue sans doute même la dialectique fondamentale de toute existence : humaine, animale, végétal (seul le minéral y échappe, et encore)...
Lieux perdus ou hauts lieux...hantés par leur beauté soudaine, à la lueur d'une heure, ou filtrée par les nuages, impromptue et sauvage aussi.
Vivre et arpenter, leur consacrer des textes de célébration ou d'hommages...
Je ne pense pas que l'attirance pour les lieux déserts, les conditions élémentales et la pierre brute soit inhumaine, je pense au contraire que cela donne à l'être humain une base authentique.
Il existe quelque chose comme un ton de base, parlé, joué ou écrit, que l'on peut entendre tout autour de la terre.
Une fois que l'on s'est accordé à sa longueur d'onde, une grande part de ce que l'on appelle « culture » se relève de peu d'importance, pour ne pas dire futile, et sonne creux. Peut-être toute vraie culture se fonde-t-elle sur ce ton de base et s'élabore-telle à partir de celui-ci...
La pensée étant ce qu'il y a de plus léger et de plus mobile, c'est elle qui représente la plus grande valeur.
La route avait été là pour « essayer de mettre le doigt sur le pouls de notre terre vivante et laisser parler, même de façon fragmentaire, le monde primordial... (La Route Bleue)
Une parole dense, une culture fondée, un monde intimement et intensément vécu. Fonder une culture basée sur l'expérience d'un tel monde a été mon but depuis le début de mon activité intellectuelle et poétique.
C'est du terrain géoanarchique que vont naître les notions de « culture planétaire » et de « poétique du monde ».
Le tantrisme pour Kenneth White c'est : « le fait d'allier une métaphysique à une plongée totale dans la matière même de l'existence. »
« Je reste persuadé que l'être humain n'arrive à vivre un tant soit peu profondément sur cette Terre que grâce à quelques œuvres fortement poétiques et vigoureusement pensantes, élaborées dans la distance et le silence, à l'écart de l'Histoire... »
« Le vrai travail ce fait dans des lieux isolés périphériques, et non là où l'on discute, où l'on s'agite. J'ai toujours vécu aux périphéries. Et le rivage m'intéressent en particulier parce que c'est le lieu de rencontre de plusieurs forces, Je vis dans un champ de forces et de formes. »
« Un bon livre, un vrai livre doit se comprendre à quatre niveaux : le sens littéral, où l'on raconte ce qui se passe ; un sens social et politique ; un sen,s philosophie ; un sens exotérique, voire initiatique. Etant entendu que ces quatre sens ne se suivent pas séparément mais s'interprètent et se complètent. »
« Quand on vit dans un champ d'énergie où plusieurs forces se rencontrent, la notion d'identité, dont on fait grand cas dans le désarroi actuel, est superfétatoire. »
« Notre chemin présentement devrait aller de la littérature à la poésie, de la civilisation à la culture, de la société à la vie. »...
« La poésie est primordiale, a existé longtemps avant la littérature, opère à un niveau de conscience plus profond. Aujourd'hui l'homme qui désire être poète doit d'abord batailler pour se frayer un passage vers elle. Il lui faut se débarrasser de tout ce qui vient se placer entre lui et la réalité. C'est une grande tâche que de devenir un poète. »
« Le poète ne se soucie pas d'art mais de réalité. »
« Penser » et « Être » font partie d'un même acte, d'un même processus, qui vise à maintenir, parmi les phénomènes (…///...) , une ouverture dans laquelle peut avoir lieu la fondation d'un monde...
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GEOPOESIE :
Le fondamental ; c'est-à-dire le poétique...
(Avec la géopoétique, qui prend son point de départ dans le rapport de l'être humain à la terre, White veut jeter les bases d'une nouvelle culture, voire d'un nouveau monde.)
« Par « poétique » j'entends une dynamique fondamentale de la pensée. »...
L'écriture poétique est chez kenneth White comme « une force possible du travail chamanique »
« Une culture est aussi un champ de références . »
« La poésie, la science, la philosophie ne sont pas essentiellement séparées les unes des autres. »
« J'ai plus en commun avec un scientifique ou un philosophe qui comprend l'idée géopoétique qu'avec un poète qui n'y entend rien. »
« Si la géopolitique a pour but ultime la gouvernance du monde, la géopoétique a pour but, autrement plus difficile et inspirant, de le refonder. »...
«Renouveler, refonder la culture, en remontant à la base de toute culture ; le rapport entre l'esprit humain net la terre. »
« A travers les siècles et les millénaires, la culture (ce qui permet d'augmenter sa vie et d'affiner son esprit) a été fondée sur le mythe, la religion, la métaphysique. Aujourd'hui, elle n'est plus fondée sur rien... (…///...) La seule loi étant celle du marché. Tout le monde, enfin un nombre croissant d'individus, sent qu'il manque une base. (…///...) C'est une nouvelle base qu'il nous faut. C'est cette nouvelle base que propose la géopoétique.»...
Le poème géopoétique paraît alors un exercice spirituel où le « je » s'efface pour mieux entendre, voir, dire et montrer le monde physique, le dehors...
« La géopoétique à un but difficile et inspirant ; celui de refonder le monde... »
« La géopoétique c'est une construction puis une déconstruction. »...
La géopoétique est une conception de la vie dégagée enfin des idéologies... C'est la recherche d'un langage capable d'exprimer une autre manière d'être au monde (un rapport à la terre (énergies, rythmes, formes...) (…///...) Il s'agit d'un mouvement qui concerne la manière même dont l'homme fonde son existence sur la terre... Explorer les chemins de ce rapport sensible et intelligent à la terre, amenant à la longue, peut-être, une culture au sens fort du mot...
« La géopoétique basée sur la trilogie eros, logos, cosmos, crée une cohérence générale – c'est cela que j'appelle « un monde »...
« La géopoésie est une théorie-pratique qui peut donner un fondement et des perspectives à toutes sortes de pratiques (scientifiques, artistiques, etc.) » « Elles entent de sortir aujourd'hui des disciplines trop étroites, mais qui n'ont pas encore trouvé une assise et donc une dynamique durable. »
« La géopoétique élargit l'horizon pour donner à voir ce « dehors » auquel la conscience du poète se lie. »...
« La géopoéqique crée un monde humain en accord avec la Nature tout en s'en détachant. »...
Le monde, celui dont il est question, celui qui commence à se profiler peut-être (du moins dans quelques esprits) doit être en accord avec la terre... (…///...) il doit y prendre son origine, tout en étant autre chose, quelque chose comme l'accomplissement de la terre. Un monde en émergence... Une dynamique fondamentale...
Cette poétique de l'esprit humain correspond à une poétique du cosmos... Si l'on est sur Terre, on est nécessairement dans le cosmos...
Essayer de retrouver un certain sens de la terre, un certain sens du fondamental, et la perception fraîche du monde. »
« Vivre sur terre avec une conscience cosmique. »
« La géopoésie est une théorie-pratique qui peut donner un fondement et des perspectives à toutes sortes de pratiques (scientifiques, artistiques, etc.) »
La géopoésie : Une autre manière de penser, un autre être au monde...
« Je dirais aussi que l'écriture géopoétique est d'abord la tentative de se situer dans le plus large espace possible ? C'est un moyen d'ouvrir un monde, en suivant les lignes de la Terre. »
« Nous avons grandement besoin d'un nouveau langage, et de cette densification du langage qu'est une poétique... Une poétique, puissante et rayonnante, de l'espace, de la terre, du monde. C'est ce que j'appelle la géopoésie. »
« Développer une écologie de l'esprit basée sur l'idée que les manifestations les plus fertiles et les plus fines de l'esprit ont leur source dans un rapport profond entre l'esprit et les forces, les formes du multivers biocosmique (Selon Gregory Bateson)
« Je ne pense pas que l'attirance pour les lieux déserts ; les conditions élémentales et la pierre brute soit inhumaine, je pense au contraire que cela donne à l'être humain une base authentique... Peut-être toute vraie culture se fonde-t-elle sur ce ton de base et s'élabore-t-elle à partir de cela. »...
« Ecrire un haiku, c'est sauter hors de soi-même, c'est s'oublier et prendre un bon bol d'air frais. »...
« Or, la pensée étant ce qu'il y a de plus léger et de plus mobile, c'est elle qui représente la plus grande valeur. »
« Que les hommes cessent de se croire seulement entre eux. »
« Redécouvrir profondément la terre » en revenant au fondamental, c'est-à-dire le poétique. »
« La géopoétique est une théorie-pratique transdisciplinaire applicable à tous les domaines de la vie et de la recherche, qui à pour but de rétablir et d'enrichir le rapport Homme-Terre depuis longtemps rompu, avec les conséquences que l'on sait sur les plans écologiques, psychologiques et intellectuels, développant ainsi de nouvelles perspectives existentielles dans un monde refondé. »...
« Disons que l'écologie, bien comprise, est incluse dans la géopoétique. »(...développer une écologie de l'esprit basée sur l'idée que les manifestations les plus fertiles et les plus fines de l'esprit ont leur source dans un rapport profond entre l'esprit et les forces, les formes du multivers biocosmique. »
Le projet géopoétique (tel qu'il est présenté depuis quelques années) n'est qu'une configuration préliminaire...
Il s'agit d'un mouvement qui concerne la manière même dont l'homme fonde son existence sur la terre... Il n'est pas question de construire un système, mais d'accomplir, pas à pas, une exploration, une investigation, en se situant, pour ce qui est du point de départ, quelque part entre la poésie, la philosophie et la science.
La géopétique est le nom que je donne depuis quelques années à un « champ » qui s'est dessiné au bout de longues années de nomadisme intellectuel. Pour décrire ce champs, on pourrait dire qu'il s'agit d'une nouvelle cartographie mentale, d'une conception de la vie dégagée enfin des idéologies, des mythes, des religions, etc... et la recherche d'un langage capable d'exprimer cette autre manière d'être au monde, mais en précisant d'entrée qu'il est question ici d'un rapport à la terre (énergies, rythmes, formes), non pas d'un assujettissement à la Nature, pas plus que d'un enracinement dans un terroir. Je parle de la recherche, (de lieu en lieu, de chemin en chemin) d'une poétique située, ou plutôt se déplaçant en dehors des systèmes établis de représentation....
Le champ qui se dessine actuellement, peut-être, c'est celui d'une trajectoire poétique, qui doit venir de loin pour aller loin...
Chaque langue est une carte ; la carte jamais terminée, d'un monde en émergence...
Cette poétique de l'esprit humain correspond à une poétique du cosmos...
L'esprit poétique est une sorte de yoga (non en posture ou respiration) mais un yoga de l'esprit qui existe comme tel dans la poésie hindoue...
L'important : la justesse, l'extravagance et la force poétique ; une manière de vivre et d'habiter le monde...
De l'ART :
« Avant tout, il s'agit d'approfondissement et d'expansion, il s'agit d'expérimenter, pas à pas, passage après passage, la sensation de la vie sur terre, d'exprimer une conception du monde, et d'indiquer le rapport le plus dense, le plus subtil possible entre l'esprit humain et le « chaosmos »(chaos/béance/cosmos)...
Il convoque à l'oeuvre la pluridisciplinarité, l'interdisciplinarité et la transdisiplinarité...
Une position qui peut faire controverse :
« Le nouveau en géopétique remonte au très ancien, y compris au très ancien culturel, mais en dégageant cet « ancien » des gangues mythiques, religieuses, métaphysiques dans lequel il a été inséré. »
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Hommage (Bran Du) septembre 2023
Bran Du quelques mots sur l'ami Kenneth White
Septembre 2023 :
Kenneth White a semé semences et graines dans une terre qui en accueille les germes pour les féconder et les fertiliser quand l'état des conscience ouvert sur l'immensité et l'extrême vastitude de l'Univers donneront aux poètes à « respirer » de nouveau la flamboyance et la pétulance de la vie...
Il a ouvert son esprit au contact des éléments et des règnes, il a humé la Terre de Mémoire et la Terre du Devenir ainsi que celle de la Présence au monde de ce qui se doit d'être en équilibre, en harmonie, en cohérence étroite avec les cycles et les rythmes de la grande orchestration et chorégraphie du Vivant...
Il est le langage et la pensée d'une nouvelle société à venir et qui pour l'heure est encore en gestation...
Il nous propose pour cela des pistes, des axes, des orientations des cheminements, des navigations « géo-poétiques » qui sont de nature à nous permettre de nous relier à celle-ci pour en conjuguer la sève et le songe, la résine et le rêve...
Il a tourné le dos à la paresse intellectuelle de notre modernité, aux « veuleries » de toutes les sortes, aux jacasseries de salon, aux contradictions et controverses stériles et nombrilistes, à l'anesthésie générale, à l'hypertrophie du « Moi », aux arrogances et prédations perpétuées par l'homme sur toute la vie qui l'englobe, à l'indigence institutionnée....
Il a repris prise de Terre et d'Ether, renoué avec les pérégrinations de l'esprit, des sens et du Coeur, marché avec les penseurs, le scientifiques et les poètes qui ont retrouvé les sentes d'essentialité, les vieux chemins archaïques de la recouvrance fondamentale, élémentaire et primordiale...
Il a dialogué avec les tempêtes, les arcs-en-ciel, le vagabondage des vents et des nuages, les flambées d'aurore, les brasiers du crépuscule, les marées du jouir, les abysses de l'océan et les anfractuosités du Possible devenu lors possible...
Il a recousu les accrocs que l'homme à fait à ce qui le recouvre de réalités, d'affinités et de correspondances...
Il a tissé ensemble, les brins de vie, de joie, d'amour, de naissance et de mort. Il a fait corbeille de mots, soleil de son Verbe et fruits de ses pensées....
Il a osé « être vrai » parmi le simulacre et le paraître, parmi l'illusoire et le superfétatoire d'une société aveugle, sourde et suicidaire...
Il a fondé un mouvement qui s'insère dans celui de la Vie elle-même et qui circule autant dans notre sang que parmi les étoiles...
Ce sont là les prémisses d'une « autre manière d'être au monde », de « dire ce monde là » celui « des affinités extrêmes et électives», des « altérités sauvages », des « réalités incandescentes »,en parfaite adéquation donc avec les chants du monde, la ronde des saisons et les danses de la Vie...
Sa Maison des marées, son Atelier Atlantique, ont été les lieux de fécondation et de gestation de son œuvre, ce fut la le cocon de bien des chrysalides de l'Esprit, mais ce fut surtout le domaine, le royaume, les territoires et les contrées d'un Monde Blanc appelé GWENVED du sein duquel s'en viennent et s'en retournent les cygnes sauvages de ses poèmes, de ses pensées et de son dire...
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K White article de Bernard Boisson
https://www.jne-asso.org/2023/08/23/kenneth-white-et-demain/
Avant une crise écologique généralisée ayant propulsé maints lanceurs d’alerte sur le podium des attentions, il y a eu des élanceurs alertes dans la culture pour nous inviter à vivre autrement notre existence en osmose avec la Terre.
Kenneth White, auteur très fécond, en faisait partie. Au point que ceux qui aujourd’hui s’inscrivent dans une démarche de désencombrement de la pensée par une expérience fondamentale du monde, ont toutes chances de se retrouver dans le faisceau ouvert de tout ce qui l’a fait cheminer…
par Bernard Boisson
Si nous notons une certaine distanciation littéraire de Kenneth White avec les alarmes écologiques de notre temps, le propos n’était pas hors de ses discussions privées. Mais il conviendra de penser que son retour au vécu essentiel ne devait pas être mis en diversion des cris d’alarme qui surviennent quand nous sommes coupés de tous liens fondamentaux avec la Nature, le Vivant, et la Terre.
D’abord poète, puis essayiste, professeur à la Sorbonne, initiateur du concept de géopoétique comme soubassement d’une théorie pratique, avec un institut portant ce nom ; puis fédérateur international de cette mouvance, Kenneth White, est mort à Trébeurden le 11 août 2023, âgé de 87 ans. Il y résidait avec Marie-Claude, sa femme traductrice de ses œuvres et co-artiste, à Gwenved (le monde blanc).
Ainsi avaient-ils nommé leur lieu de vie. Il appelait aussi son bureau « l’atelier atlantique ». Ses funérailles se sont passées dans le Finistère le 16 août à Saint-Thégonnec. Né à Glasgow le 28 avril 1936, il s’installera définitivement en France en 1967 après des études et des allers-retours depuis 1959.
Sa période de notoriété se situera dans la suite immédiate des Trente glorieuses, notamment en apparaissant dans l’émission Apostrophes de Bernard Pivot… Tout dernièrement, l’état de sa santé ne lui aura pas permis d’être présent lors des rencontres géopoétiques de Trébeurden portant sur son œuvre, les 15 et 16 juillet 2023. Cet évènement intervint moins d’un mois avant son décès.
Son œuvre est née dans l’inspiration des grands espaces ouverts de l’Ecosse pour se prolonger dans un développement d’érudition à partir de la France. Il trouvera là un cadre moins ostracisant à l’ouverture d’approches littéraires en communauté d’inspirations avec la sienne. Kenneth White est l’homme de la « pérégrination » (mot qui lui est cher), autant dans le paysage que dans la pensée.
Ses prédilections expérientielles le lient en premier lieu à « l’espace atlantique ». Son expérience poétique nous ranime dans les perceptions crues du monde, juste avant la tentation de les recouvrir par des interprétations mystiques. En effet, il tendra à s’affranchir de leurs connotations face aux opinions clivantes, elles-mêmes en diversion du vécu initial.
Il trouvera au niveau planétaire maints courants poétiques et philosophiques dont l’art de vivre le monde dans son essence première rejoignent en écho le sens infus de ses attirances. D’où un élan pour relier cette universalité pressentie de conscience sous le vocable de « géopoétique ».
Ayant nourri de sens et de percepts vivants ce concept, Kenneth White en a fait un véritable courant ouvert à la synergie d’auteurs. Mais définir la géopoétique comme un « art poétique basé sur l’exploration des réalités géographiques » serait seulement situer son cadre.
S’ajoute à cela une démarche de désencombrement de l’esprit, retirant de l’expression toute fioriture de langage, toute métaphore, toute enchère esthétisante, toute fantasmagorie ou autres dérivations de l’imaginaire pour simplement nous réveiller dans l’instantanéité de la perception vaste et nue.
Les terres qui seront pour lui les plus propices à ce rafraîchissement de l’inspiration sont « les paysages archaïques », les « Finistère » où le BTP et ses aménagements finissent par se taire… Il s’agira de lieux où le grand large retrouve ses prérogatives dans les courants du monde. Nous pourrons goûter aujourd’hui à l’essence de cette démarche telle qu’il l’a directement vécue dans Un monde ouvert, anthologie personnelle publié dans la collection Poésie de Gallimard.
A noter aussi que la géopoétique dans son esprit ne tient pas en exclusivité la nature, mais aussi une sorte de naturel soudain dans la perception appréhendant
l’humain et l’urbain. Outre sa part intime d’écriture, à noter entre autres, trois essais venant fonder la géopoétique : La Figure du dehors (1982) ; L’Esprit nomade (1987) ; Le Plateau de l’Albatros, introduction à la géopoétique (1994).
On comprend dans un tel parcours le besoin de Kenneth White, né à l’inspiration par sa communion directe aux confins paysagers, de faire des recherches d’antériorités dans la littérature, les arts, les sagesses du monde, et même dans les sciences selon leur manière latente d’être poétique…
Il a voulu le faire en s’émancipant de tout militantisme et de toute religiosité ou mythologie mettant en dérivation la connaissance. A ce titre, il est devenu un encyclopédiste transversal des rapports terriens qui fondent l’humain dans le sensible.
Dès lors, sa destinée iconoclaste est devenue suffisamment puissante pour soulever la ferveur de ceux qui ont cheminé dans des parcours parallèles.
Cette intention fédératrice s’est vue notamment amorcée dans les Cahiers de la géopoétique. Il y a dans l’esprit de la géopoétique un flash d’éveil sensible à l’égard de la nature qu’on ne retrouve pas dans les arts naturalistes esthétisants plus focussés sur l’observation d’espèces, et reliés aux seuls discours de biodiversité.
Il y a aussi dans la géopoétique une forme d’écologie littéraire que l’on sent déficiente dans l’écologie scientifique et politique, dont le langage s’est trop vu réduit au formatage de la communication. Ainsi la géopoétique répond en antidote à une société très acculturée dans la maturation des percepts, et très technocratisée dans les standards habilitant la façon de penser.
Pourtant Kenneth White, en tant que passeur entre cultures, a largement contribué à faire connaître des auteurs comme Henry-David Thoreau, Aldo Leopold, Walt Whitman, Gary Snyder, Herman Melville, voire l’approche wilderness de certains poètes beatniks… Ceci avant qu’il soit tendance d’en parler.
De même, l’a-t-il fait avec d’autres, notamment lors de rencontres Occident/Orient…
La géopoétique répondra prioritairement à l’injonction du poète allemand Hölderlin, d’habiter poétiquement le monde. Aussi avons-nous là, à la clé, un vaste questionnement pour réviser toutes gestions territoriales en regard desquelles nous voyons les professionnels actuels outrageusement acculturés et embarqués dans leurs conditionnements…
Dès lors, pourquoi ce courant n’a-t-il pas connu ces dernières années le contrepoint d’essor faisant défaut à nos mentalités ? Il a moins touché les naturalistes et les écologistes qu’il y aurait eu légitimité à l’attendre. On le voit par contre inspirer d’autres catégories plus hétéroclites (géologues, géographes, paysagistes, lettrés…).
Mais comment l’ouverture en brèche de Kenneth White ne nous reviendrait-elle pas demain par d’autres auteurs, tellement nos mentalités et nos manquements collectifs continuent à s’extrapoler dans leurs déséquilibres ?
Le penseur Kenneth White est-il mort dans notre sommeil médiatique tandis que le courant souterrain trans-catégoriel dont il s’est fait le révélateur demande une renaissance visionnaire par un foisonnement d’auteurs ?
Au-delà de Kenneth White, la géopoétique deviendra-t-elle une inspiration sous d’autres appellations ? Ou bien s’attachera-t-elle formellement aux dires d’un « maître », juste pour marquer un territoire culturel, tandis que Kenneth White se voyait plutôt comme un « anarcho-individualiste » ?
La géopoétique pourra-t-elle rappeler les questionnements nécessaires à notre temps, alors que sa mise sous silence serait vivement regrettable ? La magistrale investigation de Kenneth White aura-t-elle ouvert en France un courant universitaire ?
Ou bien Kenneth White aura-t-il avant tout créé une université internationale en dehors de l’université française en fondant en 1989 l’Institut international de géopoétique ?
Le besoin d’avoir créé un champ universitaire en dehors de l’université est-il en contrecoup d’une mentalité fonctionnaire ostracisée pour maintenir vivante la part créative de la géopoétique ?
Comment ces deux champs se répondront-ils demain ? Certes, la presse évènementielle a quelque peu commémoré l’homme dans ses entrefilets. Mais demain qu’en sera-t-il ? Peut-on dire « Kenneth White est mort, vive la géopoétique ! » comme on disait autrefois « le roi est mort, vive le roi ! » ?
Ainsi revient ce questionnement
Car ce qui relève d’une écologie poétique, philosophique, cognitive, phénoménologique, psychologique, artistique, éthique… semble toujours orphelin de représentativités institutionnelles pour soutenir un continuum de maturation entre les générations en donnant une lisibilité sur ses lignes de force !
Il y aurait pourtant là les défenses immunitaires de notre présence au monde, pour outrepasser notre science écologique sans conscience terrienne. Sans poétique, la conscience écologique devient technocratique et disciplinaire et perd le lien vivant avec l’âme des peuples par une mise sous tutelle instrumentalisant l’éco-anxiété.
Dans les champs disciplinaires autres, à l’instar de la géopoétique, et maintenus à l’état larvaire, il devient très lassant d’avoir l’impression de « réinventer la roue » tellement dans les médias, nous redémarrons toujours au point mort de la maturation, comme si des prédécesseurs n’avaient jamais travaillé le terrain de l’esprit.
Wikipedia développe une biographie et une bibliographie notoirement étayées sur Kenneth White pour que toute personne voulant débroussailler son cheminement obtienne rapidement des repères.
D’où mon sentiment qu’il est moins important de faire doublon dans cet article, alors qu’activer les questions sur la transmission concernant une forme antidote de conscience m’apparaissent autrement plus cruciales.
La pensée de Kenneth White devrait être aujourd’hui indispensable dans l’éducation des décideurs de l’art contemporain qui, voulant ne pas être sur la touche par rapport à une conscience écologique montante, n’ont vraiment pas le niveau expérientiel de nature, ni la maturation culturelle pour décider du sort des artistes qui conviendraient à la représentativité des changements de conscience nécessaires.
De même, il importe d’avoir des arts de nature, non ramenés aux arts naturalistes venant en simple décoration des discours scientifiques et écologistes ; donc non-déficients en maturation conjointe, autonome et différenciée touchant la dimension existentielle des rapports humain/nature.
Un art fondamental de nature ne peut être non plus réductible à une simple créativité opportuniste de communication… Un retour à la nature, fatalement, bouscule les doctes principes de l’art conceptuel, au point que pour ma part, je me risque à enjoindre la nécessité vitale et cruciale d’un art post-contemporain.
On souhaiterait Kenneth White d’être à la géopoétique ce qu’André Breton a été au surréalisme. On note en passant que Kenneth White a adjoint son nom et sa pensée à une centaine d’ouvrages initiés par d’autres auteurs artistes (photographes, etc.).
Mais certainement que maints autres auteurs qui auraient pu aussi se relier au courant de la géopoétique, ont eu tellement de mal à trouver les conditions de vie adéquates à leur inspiration qu’une naissance culturelle est passée dans les trous de la passoire. N’en déplaise : ce qui n’a pas été fait reste à faire.
C’est quasiment une loi dans la maturation humaine. A l’heure des cassandres du climat et de la biodiversité, ainsi que des apôtres industriels de la transition écologique… on devrait avoir un ministère de la culture rappelé à une vocation de retour aux sources concernant le grand reset qu’il nous incombe d’accomplir dans la dimension existentielle des rapports humain/nature.
Quand nous aurons enfin compris le problème dans toute l’ampleur de son enjeu, un Kenneth White ne sera plus vu comme un has been dans la rotative médiatique des renoms, mais comme un précurseur qu’on ne peut omettre dans ce que lui-même appelait « le grand travail » pour renouer avec la Terre…
Remerciements à Michel Capmal pour des concertations préliminaires à cet article.
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K White : Textes poétiques
« Car toujours revient la question
comment
dans la mouvance des choses
choisir les éléments
fondamentaux vraiment
qui feront du confus
un monde qui dure
et comment ordonner
signes et symboles
pour qu'à tout instant surgissent
des structures nouvelles
ouvrant
sur de nouvelles harmonies
et garder ainsi la vie
vivante
complexe
et complice de ce qui est.
(Récits – Prose narrative)
…///...
« Où va le monde ? Vers le Blanc ? Où va le Blanc, vers le Vide. Où va le Vide ? Le vide va et vient comme le vent. »
(Le Grand Rivage)
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« Ce qui m’intéresse à présent
Ce sont les champs silencieux
Qui s'étendent alentour
Les mouvements de la mer
Le ciel semé d'étoiles
Les rapports entre mon corps et l'univers
Entre les nébuleuses et mon cerveau. »
(Le Testament d'Ovide)
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Je fus appelé dehors
Le grand ciel m'a parlé
Le bois noir m'a parlé
Le feu m'a parlé
Je fus appelé dehors
J'ai vu la lune croître et décroître
J'ai vu le sentier du vent
J'ai vu une rivière dans le ciel
J'ai vu un vol d'étoiles bleues
J'ai vu la mer brumeuse
semblable à du lait
et des îles peuplées d'oiseaux (…)
(« L'instant perpétuel »)
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Kenneth White cède souvent la parole aux oiseaux en particulier au corbeau... In Praise of Crow « Eloge du corbeau »)
« Depuis le temps qu'on en cause
Tout le monde la connaît
la chanson du rossignol
mais le corbeau, ah
quand il croasse
c'est tout autre chose. »
(Le corbeau à un autre chant : ka, kaya-gaya, ka, krr, krarak, kraruk ; krie ; krie.)...
…..........................................
Mais quand je marche seul
sur les rochers ou les prés marins
le silence même s'illumine
et je ne pense ni à la culture
ni même à la subsistance
il n'est question que d'aller plus loin au dehors
toujours plus loin au dehors
vers l'extrême ligne de la lumière...
(Poème d'Ecosse)
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« Par delà le tumulte
Qu'est vivre, aimer et mourir
Le ciel soudain s'éclaircit
Balayé par un grand vent blanc. »
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C'est dans la forme des caps
c'est dans la façon qu'on les vagues
de se briser sur la côte
C'est dans la lumière changeante
C'est dans le clair silence de ce matin d'avril
en homme qui voudrait faire l'équation
entre paysage et pensée
j'ai marché en ce lieu
Finisterra
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Matin de neige à Montréal
Certains poèmes n'ont pas de titre
Ce titre n'a pas de poème
Tout est là dehors
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La beauté est partout
même
sur le sol le plus dur
le plus rebelle
la beauté est partout
au détour d'une rue
dans les yeux
sur les lèvres
d'un inconnu
dans les lieux les plus vides
où l'espoir n'a pas de place
où seule la mort
invite le cœur
la beauté est là
elle émerge
incompréhensible
inexplicable
elle surgit, unique et nue -
à nous d'apprendre
à l'accueillir
en nous
Le Grand Rivage
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J'ai tout retiré de ma chambre
hormis quelques images
Il reste trois fois rien
l'aile d'un goéland
un bloc de pierre glacée
la photo d'une fille nue
Au centre de ce vide
mon être danse
…......................................
Merci pour cette poignée de jours d'avril
pour le vent blanc qui souffle
pour la terre sombre et les herbes entremêlées
et la fille qui marche à mes côtés
(Au pays des douze collines, Irlande)
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Ils ont tourné, tourné. Ils ont tourné dans l'air vif et claire.
Je les ai suivis des yeux et de l'esprit :
Sur le lac vide
ce matin du monde
les cygnes sauvages.
(Les cygnes sauvages.)
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Krêê, krêê
Krêê, krêê, krêê
c'était un corbeau
seul sur un roc
à la tombée du jour
du côte de Landrelec
Krêê, krêê
Krêê, krêê, krêê
le son de ce cri ce soir là
était comme la dernière
note de la création
sur notre planète précaire
Krêê, krêê
Krêê, krêê, krêê
la nuit venue
sous une pleine lune brouillée
reprenant ma route silencieuse
j'ai regagné l'atelier.
(Les archives du littoral)
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Souvenirs : J'ai rencontré Kenneth White pour la première fois dans les années 70 dans une librairie d'Orléans où il procédait à une dédicace d'un de ses ouvrages...
Je lui ai adressé par la suite quelques uns de mes poèmes qu'il a lu et dont il m'a fait en retour quelques commentaires en m’encourageant à poursuivre l'écriture mais sans abuser de mysticisme me dira-t-il...
Je lui ai rendu hommage dans un article le présentant dans la revue Panart qu'il à apprécié globalement...
J'ai revu Kenneth à la Maison de la poésie en 1979 où il avait organisé un spectacle appelé « le Monde Blanc » (lectures par 5 comédiens de textes amérindiens, inuits, celtes et asiatiques.)
Je me suis abonné aux cahiers de Géopoésie en 1990...
Mais j'avoue que certains auteurs publiés dans ce cadre ne me parlaient pas beaucoup et que l'emprise universitaire non dénoué d'intellectualisme dans cette revue ne la mettait pas à la portée de tous et de toutes, loin de là...
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Kenneth White et le monde Celtique :
Il écrira de magnifiques lignes sur le monde Celte notamment dans la revue Artus d'Hérvé et Claudine Glot du Centre Arthurien de Comper en Brocéliande...
Il écrira un long poème intitulé « Brandan's Last Voyage » reprenant la Navigation de Bran (Immrama)
(« L’intérêt de Kenneth White pour la poésie Celte la fait taxer de fasciste. ») Lionnel Seppeloni
Lors d'un entretien avec G Deleuze K White fait état de ceci :
« On n'était sur aucun plateau mais dans un bourbier où se
mêlaient confusément un celtisme appréhendé comme menaçant et un orientalisme de pacotille. »... « Deleuze me donnait l'expression de s'égarer et de se perdre loin de mes pérégrinations intellectuelles, poursuivies depuis lors. »...
Il rendra hommage à Scot Erigène et fera état « d'un espace pélagien »...
Dans Cartes et Territoires et en, parlant de l'Ecosse (Alba), il relatera la légende de Finnn et des Fianna...
Après avoir écrit des lignes magnifiques sur la civilisation celtique, il délaissera ce sujet craignant pour sa « notoriété » et son « image » cédant alors devant la stupidité et la bêtise ambiante et la phobie anti-celte assez répandue hélas. Dommage pour nous et la littérature !
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CITATIONS :
"Il y a dans l'homme la possibilité d'une existence unifiée."
Henri Atlan
« La philosophie... est l'expérimentation de quelque chose qui échappe à l'Histoire. »
« Etre dans la maison sans quitter la route et être sur la route sans quitter la maison. » Sagesse japonaise
« Une des fonctions de la poésie consiste à redonner, temporairement, le bonheur ontologique perdu. » Yves Bonnefoy
« Je ne vis pas en moi-même, je m'intègre à ce qui m'entoure.
l'océan, la montagne, la forêt, le désert parlent « un langage mutuel » plus clair que les langages fabriqués par les hommes. Entrer dans cet espace là, c'est « vivre un être plus intense. »
« Le voyage est l'acte poétique par excellence. » Baudelaire
« Une des fonctions de la poésie consiste à redonner temporairement, le bonheur ontologique perdu. » Yves Bonnefoy
« Pour pouvoir devenir parole, il a fallu que le langage soit d'abord une écoute, il a fallu que les hommes, patiemment écoute, c'est-à-dire cherchent à comprendre ces langues infinies qui les entourent et qu'ils ne comprennent pas. » Jean Christophe Bailly
« Nous voulons être les poètes de notre Vie » Nietzsche
« Un goût vif de l'univers. » E Renan
« Nombreux sont ceux qui s'occupent de circonstances, rares ceux qui remontent au Principe. » John Milton »
« Renouveler l'art grâce à un contact inédit avec la Nature. » Alexander Von Humbclot (?)
« Nous voulons que toutes les énergies de la Nature, que j'ai inspirées me pénètrent et qu'elles exhalent dans mon livre. » Gustave Flaubert
La vacuité cosmogonique d'émil Cioran
« Il peut paraître étonnant que les pensés profondes se rencontrent plutôt dans les écrits des poètes que dans ceux des philosophes. » Descartes
« Nombreux sont ceux qui s'occupent des circonstances, rares ceux qui remontent aux principes. » John Milton
« Les gens d'esprit se font des routes particulières, îles ou des chemins cachés, ils marchent là où personne n'a encore été. Le monde est nouveau.»
Montesquieu
« ...Nous savons qu'il y a un nouveau monde - mais qui aura assez d'énergie ? Restez fidèles à la Terre » Nietzsche
« ...Une vision qui appréhende chaque chose comme un tout... »
Werner Jaeger
« Je me sens si solidaire de tout ce qui vit qu'il m'est indifférent de savoir où l'individu commence et où il finit. » Einstein
« ...La philosophie doit entrer dans l'expérience du jeu merveilleux du monde multicolore. » Schopenhauer
« Se lancer d'énergies inédites et réjouissantes. » Olivier Penot Laccasagne
« Renouveler l'art grâce à un contact inédit avec la nature. »
Akexander von Humboldt
« Si je n'ai de goût ce n'est guère pour la pierre et pour la terre. » Rimbaud
« Que la matière même soit source et mystère de tout art. » Joseph Delteil « Le Sacré Corps »
Henry David Thoreau (A l'écoute des sons naturels dans les bois)
« Au début, je n'entendais que des sons isolés, mais quand ceux-là cessèrent, j'étais conscient du chant général de la terre... et je me demandais si, derrière ce chant là, ne s'en cachait pas un autre, encore plus universel. »
(Ceci cité par Kenneth White ajoutant : « Ce sont de telles expériences, de tels exemples, qui furent le prélude à toute ma pratique poétique, que ce soit en poésie ou en prose. ») »
« Tantôt l'Un / augmente jusqu'au point d'être le seul existant / à partir du Multiple ; et tantôt de nouveau / se divise / et ainsi de l'Un sort le Multiple / (…) Ce qui s'était formé se dissipe et s'envole / Jamais les éléments ne cessent de pourvoir à leur mutuel échange. » Empédocle
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Kenneth White sur le Blog du Corbeau :
KENNETH WHITE LA TRAVERSEE DES TERRITOIRES EXRAITS ET NOTES BRAN DU 2019 05 11 NOVEMBRE
KENNETH WHITE LES CYGNES SAUVAGES EXTRAITS ET NOTES 2019 BRAN DU 22 10 2019
L'OEUVRE POETIQUE DE KENNETH WHITE (ANTHOLOGIE) EXTRAITS 2018 BRAN DU 28 08 AOUT
KENNETH WHITE (SUITE) PASSEURS EN "GEOPOESIE", CHANTRE DE LA CELTIE et NOTES BRAN DU 2016 10 03 MARS
LA GEOPOETIQUE DE KENNETH WHITE SELON R BOUVET COMMENTAIRES ET APPROCHES BRAN DU 2015-12-02 DECEMBRE
Passeurs de géopoésie Kenneth White
En compagnie de Kenneth White "Les cygnes sauvages"... extraits
Kenneth White-Bretagne magazine
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L’œuvre de Kenneth White est conséquente soit des centaines d'essais, d'ouvrages poétiques, de récits, d'entretiens, d'études (mais « pas de romans)...
Elle a reçu dix prix décernés pour l'ensemble des œuvres publiées ou pour des ouvrages spécifiques...
Parmi ces œuvres je recommande :
La Route Bleu (prix Fémina)
Le Visage du vent d'Est
Mahamudra
Terre de Diamant
Les Cygnes sauvages
La Maison des Marées
Le Plateau de l'Albatros
Lettres de Gourgoumel
La figure du dehors
En toute Candeur
Un Monde ouvert
Scènes d'un monde flottant (Poèmes)
Le Monde Blanc et Poèmes du Monde Blanc
Le Poète Cosmographe (Entretien)
Le dernier voyage de Brandan
Dérives
La figure du dehors
Atlantica...
Entre deux Mondes (autobiographie)...
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Vidéos et filmographie :
Sur la trace des esprits ailés de Michel Dupuy
Les chemins du Nord profond François Reichenbach (sur les traces du poète japonais Bashô)
Kenneth White Nomad
Îles et Livres de Michel Moy (ces films ont été primés...)
Kenneth White du nomadisme à la géopoétique (CDDP de l'Eure)
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