ENFANT DU NORD... BARDI BRAN DU 2019 07 04 AVRIL
Pourquoi avons-nous perdu le Nord ?
Gravure de Christian TUAL
EN INTRODUCTION :
« Peut-être les âmes partent-elles vers le Nord, lors du dernier voyage, pour se fondre à cette blancheur qui semble avoir instauré un règne sans limites de temps et d'espace...
Peut-être vont-elles se mêler à la grande Source et rejoindre comme une matière initiale et indéterminée les forges neigeuses avant d'être reformulées, libérées à une nouvelle vie. Avant d'être livrées à une nouvelle errance ?...
Ainsi le Nord est-il le lieu où se noue la redite des temps, celle des âmes et des choses. Il est ce monde blanc, toujours à réinventer, à peupler d'êtres soustraits au néant et au désenchantement à combler d'images aussi fugaces et indéfectibles que l'envol d'une oie ou d'un cygne dans le contre-jour des contes et des songes... »
Marc Nagels Les Îles du Nord du Monde Edition Siloé/arthus Editeur
Enfant du Nord (Bran du 07 04 2019)
Je retrouverai le verger de mes rêves, la pommeraie de mes songes.....
Je sais l'étoile au coeur, la graine enclose dans la chair blanche du possible....
De neige est la lisse peau de la femme, de neige encore le sein où poser enfin mon front suintant de sueurs et de larmes...
Comme l'ours au printemps, je ferais une cure du vert des feuillages, puis, j'écouterai le vent me conter la saga de l'Aurore...
Les oies de passage me prendront dans le duvet de leurs rémiges et je glisserai dans le ciel comme un soleil d'avril sur le givre des matins...
Je suis de terre ; d'argile et de glaise, je suis mais, de vent aussi, et de feu et de glace, d'écume et de neige aux marées des saisons...
Sève est le mot dans l'aubier des poèmes....
Là, sous ma peau, j'ai pierre de mémoire et un homme-cerf qui lève les bras au ciel en l'offrande du jour...
Pour qui s'éveille en l'aube de son séjour tout est tambour qui bat pour la marche de l'Univers... Tout est rythme qui défile parmi le temps et l'espace, tout est fifre sous les doigts de l'amour...
De toute blancheur est le monde où s'acheminent mes pas ; mes pensées sont la proue qui divise flots et vagues et j'ai voiles hissées qui tutoient les nuages et les étoiles....
Mon coracle ; c'est le cuir de ma peau cousue au fil du désir, tannée jour après jour aux forges même de ce désir ; étanche et solide est le navire ; ardent, volontaire, audacieux est le bateau...
L'eau me portera aux fabuleux rivages, là où il n'est plus d'âge, mais que printemps nouveaux....
Dans l'océan de nuit, je me fraierai passage, mes yeux lors se feront brûlot affouillant les ténèbres, éclairant le voyage de leurs vifs flambeaux....
La peur, je l'ai laissée sur le quai des départs, elle aboie encore mais je suis trop loin pour sa rage et ses crocs...
Libre et sauvage ; c'est ainsi que je conçois le vivant qui anime mes os !...
Lors, Cap au Nord, comme le font les oies et les saumons...
Lors retour au blanc berceau !....
Je veux tout l'or du ciel sur le drapé des glaces....
Je veux reprendre place parmi le Verbe et les mots qui sont le chant du monde, son empreinte et sa trace....
Je veux le bleu, tout le bleu afin qu'en moi s'efface tout le noir de mes maux...
Cap au Nord, ai-je dit, et pour cela fendre les flots, remonter les courants, prendre brume et tempête... Qu'importe ; La mort, pour l'heure, n'est qu'un pavillon, que fouette mes songes et mon sang... Et qui ne point à l'horizon....
Le Nord... Immense étendue pour le regard qui courre comme une brise que rien n'arrête... Le Nord... Nulle boussole pour cela, mais une étoile au cœur....
Quatre îles, quatre perles de glace, quatre diamants de neige et, sur les lèvre de l'aurore le pourpre rubis des quatre sages ; cette Etincelle qui dit les feux de l'âme, qui prédispose aux braises et aux flammes et qui savent toujours rallumer la vive mémoire dans les sombres cavernes de notre humanité !...
Ici, les dieux sont jadis venus... Ils sont venus apprendre poésie et sapience et prendre vie en réalité....
Tous prenant couleur par le Blanc enseigné...
Tous là assis sur le banc de la vertu, tous par les Grands Anciens, pour l'essentiel, formés...
Initiés sont les dieux, comme l'homme nu de corps, de cœur et de pensée...
Dites-moi, est-il plus fabuleux et plus merveilleux voyage que d'explorer l'intimité et la profondeur de ce continent que nous sommes ?
A chacun, à chacune dans le découvert de ses grèves, de se voir offrir le coquillage qui est le sien !
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Postface :
« Ce sont des îles d'abondance, matrice des peuples légendaires, où jeunesse et félicité sont éternelles :
île Fortunées, Îles des Bienheureux, Tir na nOg, Avallon et Ultima Thulé...
A ces rivages fabuleux ont tenté d'aborder ceux qui un jour on fait voile d'encre ou de nerf vers les brumes froides du monde. Voguer sur les traces des tout premiers hommes, des navigateurs irlandais, des reines des neiges, des seigneurs des mers....
Une errance des songes et des images, pour que le mythe demeure intact, les légendes et les mystères figés dans leur pure fraîcheur.
Car rien ne saurait entamer la fascination pour le Nord et les îles, images éternelles de l'ailleurs. »
Marc Nagels