Les dits du corbeau noir

G PENONE/ M MERLE un dialogue extraits de lecture et commentaiures Bran du

GUISEPPE PENONE et MICHEL MERLE   UN DIALOGUE sous les Faux de Verzy


Extraits et prolongements Bran du    18 09 2012   (Edition la Petite Ecole)

« Ce qu’il y a de plus important, c’est la réflexion sur les choses… » (Plus que la technologie)

« L’écriture, c’est un capital : c’est comme un vase qui permet de conserver de l’eau pour la boire ultérieurement. » G Penone

C’est un dialogue fécond à la fois en miroir et en « traversée réciproque de miroirs » dont il s’agit ici sous des hêtres très sinueux et particuliers dans leur géométrie végétale et leur dynamique de croissance…  Le chirurgien s’interroge, interroge sa pratique et interroge l’oeuvre d’art et inversement… l’un et l’autre en cela nous interpellent et interpellent en nous l’écho, la résonnance…

En plat philosophique du jour , à découvrir, à humer, à goûter, à mastiquer, à saliver, à ingérer, à déguster, à savourer et à… digérer je vous propose ceci :

« … Quand vous êtes dans le linéaire, il n’y a plus rien qui vit… C’est comme dans une société, lorsque vous avez une sensation, vous êtes hors norme, alors le système rabaisse l’intensité de vos sensations pour vous ramener dans un cadre sous contrôle. Il ne se passe lors plus rien, vous êtes dans la norme et cela c’est la mort. Je crois que chacun de nous doit exprimer sa vitalité et se dire : « vivons nos sensations » en sachant qu’il y a un terme, qu’il y a une fin à cela et évitons d’avoir un électroencéphalogramme plat avant notre mort physique."       M Merle
« L’artiste dispose d’une liberté supplémentaire. Il peut se dire (et s’obstiner en cela) : Je refuse d’être dans le moule, dans la « norme » et sous influence. »  G Penone

Voilà un préliminaire annonciateur d’une jouissance émotionnelle et intellectuelle à venir !…  Suivons les auteurs de ce dialogue …

« …La force de gravité nous attire vers le noir, vers l’intérieur de la terre et la lumière nous entraîne vers l’extérieur, vers la vie… L’on comprend la nécessité pour tout organisme vivant d’être alimenté à la fois par ses racines et par son enveloppe extérieure…

La croissance du végétal est concentrique. Il en est de même pour celle du serpent… le mouvement hélicoïdal ou la spirale sont la base de la structure de la croissance de l’arbre…
Le principe de fluidité se retrouve dans le corps humain et dans presque toutes les formes de vie… (Toute la vie est liée à la fluidité.)…
L’ultrastructure des chromosomes, qui sont l’essence même de la la vie, montre que l’ADN qui les constitue à une organisation hélicoïdale…
C’est le mariage des structures concentriques et hélicoïdales qui rend le corps humain particulièrement résistant aux agressions physiques…
L’analogie de l’organisation de la matière humaine et de la matière végétale est évidente…

Tout ce qui nous entoure nous ramène à la forme de notre corps…

La capacité de l’homme de reconnaître les formes est limitée à celles qui sont anthropomorphes, géométriques, ou « en miroir »…

La forme est déduite de l’expérience…

Dans les Faux de Verzy rien ne se passe en périphérie sans que le centre, le chef d’orchestre, n’en soit informé ; il modifie, il amplifie, il redéploie…
Cela ressemble fortement à l’organisation du cortex cérébral…

Aucune invention de l’homme ne peut égaler l’anatomie et la physiologie du corps humain…

L’analogie de l’organisation de ces hêtres (les Faux de Verzy) avec l’organisation du système nerveux ou du système vasculaire du corps humain est évidente…

La nature est prévoyante et généreuse car si un circuit s’interrompt, elle a la capacité d’en activer un autre…

Nous avons un besoin fondamental de ce retour à la nature qui nous ramène directement aux notions de temps, de l’organisation de la matière, de sa physiologie et de ses rythmes….

L’invisible est bien souvent plus important que le visible…

Le toucher et la vue alimentent notre mémoire et vont se suppléer mutuellement selon leur défaillance…

La main est la mémoire du futur…

La mémoire est en partie issue de notre vision et de notre toucher…

Sans l’expérience de la main la création est stérile….

Le toucher participe à la mémoire et la vue, est une anticipation basée sur le passé…

On n’efface rien, les tissus ont une mémoire…

C’est grâce à la relation perpétuelle entre la pensée, l’œil et la main que surgit la nouvelle idée. Vouloir interrompre cette « triangulation » est en fait une amputation de la créativité.  (Voilà une nouvelle Triade ! - NDR)

C’est dans la difficulté que l’homme devient le plus créatif…

Se couper du travail manuel, c’est s’amputer de cette stimulation intellectuelle qui conduit à l’invention…

Presque tous les objets réalisés pour être pris par la main ont une structure cylindrique…

Les cycles de la nature s’imposent à nous pour nous rappeler les nôtres…

Je crois que le scientifique a plus besoin de trouver des références à travers l’artiste que l’artiste à besoin du scientifique…

L’accélération du temps que nous provoquons ne nous laisse plus une prise de conscience des cycles de l’homme et de la nature…
Le respect de son corps implique le respect du temps…

Il n’est plus possible de consommer une œuvre. Elle vit, elle évolue… Il faut passer du temps avec, il faut l’aimer…

La connaissance conduit le chirurgien tout naturellement à l’humilité (Il sait que toute chirurgie génère une cicatrice indélébile…) Finalement, le progrès pour la chirurgie sera de ne plus opérer mais de trouver les solutions les moins traumatisantes pour les tissus parce que la cicatrice, elle, est éternelle…

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Commentaires, additifs…   Bran du

Humilité ; ces deux hommes n’en manquent pas mais ils peuvent cependant être » fiers »  de l’ouvrage de leurs pensées, de leurs actes, de leur vie…
Ce dialogue offert, partagé, amplifié est aussi le nôtre…

Il nous « concentre » sur l’essentiel c’est-à-dire que nous faisons en conscience et compréhension « centre autour de lui, avec lui. »

Ce sont des « rappels » conséquents, importants de ce qui nous lie, nous relie, intérieurement et extérieurement et nous « constitue »… Cette mise à disposition de la connaissance, certes partielle mais o combien fondamentale, comble peu à peu, avec des matériaux adéquats, le fossé de notre ignorance et de nos projections conditionnelles et formatées…

Avoir Co-naissance que les « choses » fonctionnent plutôt mieux comme ceci ou cela, de cette façon préférable à une autre, nous aide dans l’apprentissage de nos propres outils existentiels et dans notre propre entreprise humaine…

En faisant usage des outils symboliques mais surtout analogiques, nous nous dotons du meilleur langage qui soit pour établir une passerelle, un pont, d’entendement entre diverses rives de la compréhension et l’abîme qui s’interpose trop souvent entre question et réponse, interpellation et résolution adaptée… Chaque rive est lors en mesure de mieux expliquer l’écoulement du fleuve qu’elles bordent !…

Ce sont « enseignements » que ces dialogues pluridisciplinaires , fruit d’un échange mutuel d’observations, d’expériences, d’analyses, d’études, de réflexion et de création….

Ils sont humus et terreau, sève et lumière pour notre « Arbre de Vie »…

Mettre en rapport analogique la croissance concentrique des arbres, l’ADN hélicoïdale, les mues du serpent, le serpent lui-même, les processus de régénération impliquant des pertes en vue de nouveaux gains pour le « vivant »,  les flux vitaux, la spirale en maître d‘oeuvre, l’organisation de notre cerveau, un commun chef d’orchestre, la sinuosité préférable à tout linéaire, la suppléance du génie de la nature face à ce qui compromet la poursuite de la vie, les interactions entre champ visible et invisible,  les arborescences qui structurent, organisent assurent les communications, répartitions, bifurcations et articulations indispensables, les liens « créatifs » entre pensée, vue et toucher qui assurent des conjugaisons et des connexions inventives et novatrices, la perception sensitive et intelligence des « ultrastructure » qui agencent, régularisent, qui assurent l’équilibre et l’harmonie dispensatrices d’évolution,  de juste croissance, est bien de NATURE à nous faire mieux comprendre LA NOTRE !…. Et notre indépendance impliquée dans une nécessaire et vitale dépendance consciente, lucide, éclairée et volontaire…

Merci donc à ces auteurs, à ces oeuvriers de la vie, pour ces apports et ce partage…
Ce sont des « percuteurs » qui opèrent avec les silex des sens le « bon heurt » propice aux jaillissement de l’Essence, des Flammes de l’Esprit !…

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Dernier additif :  La réflexion implique, suppose, énonce en son « corps » même une pensée « flexible » qui de ce fait ne saurait être soumise à rigidité et raideur (sans s’exposer donc à la « casse » !)  Cette « souplesse » autorise toute forme d’enlacement et d’embrassement entre rationalité intellectuelle et sensitivité émotionnelle, elle fait circuler les flux dans nos encéphales qui sont les sièges d’une dualité appelée à enfanter dans la complémentarité… La flexion sous entend la « courbe » et la courbe invite à l’amour !…  La « flexion » qui pratique une révision permanente, une capacité de revisitation quotidienne, un exercice renouvelé de la pensée donc, noue et renoue des liens plus ou moins rompus, distendus ou entretenus entre des zones « soeurs » des dits encéphales afin de coopération et de mise en œuvre symbiotiques… Et cela pour le meilleur service de la VIE… Des passerelles sont ainsi jetées entre question et réponse, interpellation et résolution, dégagement et impasse, obscurité et lumière…

Toute flèche n’a de « sens », de trajectoire et de « cible » que pour autant que se bande l’arc flexible de la pensée qui l’a conçoit et la dirige !…
Nous avons vocation, hommes et femmes, à « l’arrondissement » et ce peut-être pour faciliter nos « enfantements » de toute nature ?…
Flux de sang, de sève et de songes sont autant d’influences mutuelles et réciproques pour assurer l’écoulement de notre « eau de vie »… (Et agir sur nos « retenues » dont finalement nos écoulements se passeraient bien et que parfois ils dépassent !)
Le modèle de l’arborescence est aussi une invitation à mieux agencer, structurer, organiser, articuler, « ossaturer » notre « pensée »….
La volupté de la parole, de l’écriture,  de l’acte se tient sans doute en ces libres écoulements qui vont de la source au fleuve et s’en reviennent du fleuve à la source !…



18/09/2012