Les dits du corbeau noir

INFINIS PAYSAGES (spectacle)

En partage ce spectacle écrit pour le printemps de la Poésie en mars 2011 Bonne lecture

 

Printemps de la Poésie     Spectacle  « Infinis Paysages »             Mars 2011
        Myrdhin  : Harpe celtique et chants...
        Bran du : lectures , bardis et choix de textes...

                Introduction : Bran du

Nous pouvons visualiser une contrée, un territoire, un espace, une étendue au bout desquels notre regard butte sur une frontière...

Au-delà, il ne nous est plus donné de voir mais de percer ladite frontière et d'imaginer ce qui se tient derrière celle-ci...

Le rideau de l'horizon tiré par le cordon de l'imaginaire, nous pourrons soulever ce voile de brume et de brouillard et, lors, percevoir, et lors, pénétrer...

Ce qui se tient au-delà de la traversée d'un certain miroir (celui qui nous renvoie à nos représentations conventionnelles) est un tout autre domaine qui pour être visité sollicite notre pensée et les facultés novatrices et intuitives de celle-ci...

Il n'est pas de plus profonde, de plus mystérieuse et émoustillante exploration humaine que celle qui nous attend aux confins du connu pour offrir à tous nos sens convoqués l'immense inconnu de nous-mêmes...

Toute « perte de vue » est une invitation au « recouvrement » éclairé du Continent de l'Etre...

Nous entrons ici dans un champ de correspondances subtiles et de résonances complices.
Tous les confins donnent rendez-vous à l'Homme pour lui donner le désir d'un retour aux origines et celui d'une projection dans l'absolu et l'infini en faisant éclater toutes les barrières qui s'opposaient jusqu'alors à cette aspiration à épouser l'indicible, à affouiller le blanc mystère...

L'étrange et stimulante « migration » proposée à nos songes pendule entre le Nord et l'Ouest d'un Pen ar Bed, d'une fin de terre, où nous nous tenons, dressés sous le ciel et tendus vers une ligne de partage et de séparation qui suscite chez le penseur, voyageur, amoureux et poète, une idée, un désir, de « défloration » porteuse de jouissances inédites

De cette voluptueuse et audacieuse pénétration naîtra « l'enfant-poème » ou bien le chant d'une recouvrance fondamentale ou quelques accords empruntés à la musique des sphères...

En ces confins, nous avons souhaité convoquer, rassembler, ceux et celles qui les ont particulièrement et singulièrement arpentés, qui y ont célébré leur noce insolite, ceux qui en sont revenus transfigurés, transcendés de la tête aux pieds, ceux qui ont fait témoignage de leurs fabuleuses aventures...

Ceux qui, restitués aux rivages des hommes entretiennent ceux-ci d'un bien autre rivage qui englobe tous les océans du possible.

Introduction II : Bran  du

Que faut-il entendre, visualiser, lire d'un paysage dont le caractère essentiel est l'infini ?

Confronter, « mis en regard » face à une étendue qui semble être sans limites que ressentons-nous, quelle « visitation » en faisons-nous, quelles impressions naissent-elles à cette vue et qu'induisent-elles en termes d'émotion, de ressenti, d'évocation, de « lecture » ?...

Le ciel, l'océan, des plaines enneigées, des déserts, de très vastes étendues d'eau, des prairies rases du genre Toundra, des banquises, tous ces sites dont on ne peut englober l'étendue, qui « débordent » du regard qui les enceint, sont les expressions naturelles et privilégiées de l'infini...

L'infini d'un espace offert dans toutes ses dimensions à notre observation se définit en grande partie par le fait que le paysage observé s'étend à perte de vue...
La « perte de vue » est donc significative de la notion d'infini... Cette perte s'avère être un gain pour tout créateur amené à faire le meilleur usage de ses autres facultés...

Le paysage contemplé dans son infinitude nous contient, englobe le regard que nous portons sur lui... Nous sommes donc une infime partie de ce qui le constitue... C'est en cela que se tient l'interstice par lequel notre pensée peut s'engouffrer... C'est en cette pénétration que l'aventure réelle commence, que s'ouvre l'exploration absolue des continents inconnus...

Le paysage nous invite à visiter les moindres recoins de ce « sage pays » qui se tient en notre sein de chair, de songe, de muscles, d'os et de sang...

La pensée est alors ce balancier qui oscille entre microcosme et macrocosme et dont la bonne tenue nous autorise aux plus audacieuses et troublantes avancées et traversées...

Quand s'additionnent, fusionnent, se mêlent, l'eau, le ciel, la glace, la neige, les sables, les étendues d'herbes,de lichens et de mousses, il est temps pour l'être, dressé face au Ponant des indicibles rivages, d'apprendre, de réapprendre, l'art de se dissoudre, l'art de se conjoindre, en usant des fonctions les plus fluidiques, les plus éthérisées, les plus moulantes, dont il dispose...

Point d'envol cependant si l'espace qui se tient devant n'est pas assez grand pour que s'y déploient nos rêves...
C'est le vide, l'immensité, l'étendue infinie, qui conviennent le mieux au déploiement des rémiges de l'âme...

Les vraie questions : Avons-nous envie ou non d'aller au-delà de la ligne blanche, rouge, grise, bleue, noire, jaune ou verte de l'horizon ?
Sommes-nous prêt à chevaucher l'arc-en-ciel ?...

Gaston Bachelard nous rappelait qu'à un « paysage intérieur » correspondait un « paysage extérieur » et qu'un jour la rencontre s'opérerait en des noces secrètes, exaltantes et douces...

C'est cette « recouvrance » que nous vous souhaitons en ce printemps poétique, en ces jaillissements de vie qu'exalte toute la Nature pour nous inviter à recouvrir la nôtre ; l'intime, la profonde, la silencieuse, l'aspirante, la mystérieuse et l'étonnante...

Il n'est, en ces enthousiasmantes et périlleuses navigations, qu'un seul « portulan » à décrypter et celui-ci est incontestablement « géo-poétique »...

Il nous faut ici nous doter, en sa prime jeunesse, en sa volupté printanière et débridée, d'une âme « rimbaldienne »...

Les poètes des rivages, ici convoqués, nous aident à franchir le passage, ils nous enseignent comment conjuguer l'infini d'un pays où le Verbe tisse infiniment « le lieu et les formules »...

St John Perse  (Amer – Eloges...)  
                    Amer (extraits) :
 « Et c'est un chant de mer comme il n'en fût jamais chanté et c'est la mer qui nous le chantera ;
La Mer, en nous portée, jusqu'à la satiété du souffle
Et la péroraison du souffle
La mer en nous portant son bruit soyeux du large
Et toute sa grande fraîcheur d'aubaine par le monde...

Poésie pour apaiser la fièvre d'une veille au périple de la mer. Poésie pour mieux vivre notre veille au délice de la mer...
Et c'est un songe en mer comme il n'en fut jamais songé, et c'est la Mer en nous qui le songera :
La Mer, en nous tissée, jusqu'à ses ronceraies d'abîmes, la Mer, en nous tissant ses grandes heures de lumière et ses grandes pistes de ténèbres »...

« Pleurer de grâce, non de peine, dit le Chanteur du plus beau chant ;
« Et de ce pur émoi du coeur dont j'ignore la source,
« Comme de ce pur instant de mer qui précède la brise... »

« Parlait ainsi homme de mer, tenant propos d'homme de mer.
Louait ainsi, louant l'amour et le désir de mer.
Et vers la mer, de toutes parts, ce ruissellement encore
Des sources du plaisir...
.../...
Ah ! Quel grand arbre de lumière prenait ici la source de son lait !...
.../...
Car tu nous reviendras, présence ! Au premier vent du soir,
Dans ta substance et dans ta chair et dans ton poids de mer, ô glaise ! Dans ta couleur de pierre d'étable et de dolmen, ô mer ! Parmi les hommes engendrés et leurs contrées de chênes rouvres, toi mer de force et de labour »
.../...
« Nous nous portons un jour vers toi dans nos habits de fête, mer innocente du Solstice, mer insouciante de l'accueil, et nous ne savons plus bientôt où s'arrêtent nos pas...
.../...
Nous franchissons enfin le vert royal du seuil, et faisant plus que de te rêver, nous te foulons, fable divine !...
.../...
La Mer, elle-même, sur sa page comme un récitatif sacré...
                        (Choeur « Mer de Baal – mer de Mammon »)

« Gens des confins et gens d'ailleurs, ô gens de peu de poids dans la mémoire de ces
lieux ; gens des vallées et des plateaux et des plus hautes pentes de ce monde à l'échéance de nos rives ; flaireurs de signes, de semences, et confesseurs de souffles en Ouest ; suiveurs de pistes, de saisons, leveurs de campements dans le petit vent de l'aube, ô chercheurs de points d'eau sur l'écorce du monde... »

« Me voici restitué à ma rive natale. Il n'est d'histoire que de l'âme, il n'est d'aisance que de l'âme... »

« Depuis un si long temps que nous allions en Ouest, que savions-nous des choses ? »

Victor Segalen ( Tibet – extraits)

Victor Segalen, alchimiste en ses propres métamorphoses, se confronte de corps et d'esprit à l'athanor de l'absolu et de l'infini...
Il cherche, marche, enquête, piste, explore, voyage, traque, apostrophe, louange..
la contrée magique qui agite les cornues du sang et du songe...
Sur le portulan de son imaginaire, il trace des routes impossibles mais que son esprit arpente avec la plus sauvage, la plus ardente, ,la plus folle et la plus douce des fièvres : la fièvre poétique...
Et c'est au bout de la flèche acérée des mots élus et choisis, des termes inspirés parce que « respirés », que se dessine, se formule, la cible mouvante et émouvante, mobile et immobile : ELLE – L'AUTRE ; celle que l'on n'atteint jamais, mais qui vous retourne, toute flèche décochée, en plein coeur, perçant la mort jusqu'à l'os et en faisant sourdre des nouveaux ruisseaux de vie...
Tout ici se conjugue au Féminin (neige, montagne, blancheur, déesse, nudité, poésie, apothéose ) L'Autre, dans toutes ses présences, dans toutes ses expressions visibles ou non...
C'est de la quête éternelle, absolue, infinie de ce Féminin, de ce « Continent noir » selon le terme d'André Breton, qu'il s'agit d'investir ici, en ce lieu, en ces présences, en ces confrontations, en ces hautes joutes... Une quête qui s'apparente à celle de l'Innacessible Etoile »...  Nous aurons l'image de celle-ci serrée sur notre poitrine orpheline quand nous serons de retour du continent Amour... Car on ne peut demeurer de notre vivant en cette île promise et parfois miraculeusement entrevue...

La divine contrée est éternelle et blanche. Elle dévoile la pointe de son sein immergeant de la frange des neiges et cette vision même est gage d'éternité...

Tout royaume de poésie et, par nature, par essence, dans son origine et dans son infinitude, Une île tournoyante dans la spirale des songes...

Victor Segalen "Peinture"(extraits)  

« Un jour large, d'une étendue inquiétante : le ciel est double : le dessus et le dessous sont semblables et le sol manque à vos pieds. Déroulez donc tout d'un coup ce qui peut tenir d'espace entre vos deux bras ; puis ne bougez plus : il n'est rien qui doive changer dans cet horizon isotrope.
Et pourtant, sous nos yeux, cela change de peau, de couleur et d'humeur : cela n'est rien qui s'humilie comme la route. Et pourtant, pénétré du soc des carènes, cela est lacéré par les filets, battu par les rames, habité par des êtres myriadaires comme des oiseaux dans le vent... Cela est plus vieux et fondamental que le continent solide : c'est la dormeuse, la pleureuse, la volubile mer dont on va dire le nom (que tant de voyageurs ignorent)...
Mais, ni la mer du Golfe où trois journées mènent d'un cap jusqu'à l'autre – ni les eaux chaudes où les poissons filent comme des flèches et battent de leurs ailes libellules...
Ni la Glacée, qui porte durant les mois d'hiver.
Celle-ci n'est pas froide et n'est pas chaude ; tiède juste au degré des larmes et de la pluie d'orage. Elle n'est point ici où là. On la connaît tout d'un coup, devant soi, quand on espérait l'avoir fuie. C'est la mer de la Grande Nostalgie. »

…./....

Tibet : « Je veux dire ces paysages vivants : deux sourcils et un front, des joues amantes, et des yeux si lourds avec ce regard d'orage ; ce puits effrayé de se voir, et cette source des dieux...  .../...
Par ce voyage de la vie en caravane personnelle, exploratrice du temps blanc...
A moi, Thibet, à l'aide ! à moi ! Voici l'imprévu et l'obstacle, voici la frontière du fini.
Il faut passer, je dois passer, et malgré toute la débâcle franchir le Grand Fleuve d'Infini
La voici nue et blanche et haute afin de mieux me rassouvir d'Elle – ma multiple compagne – L'Autre Etre toute de mon sang – la même en sa métamorphose – THIBET, par beauté, exalte-là !
.../... La soeur de sang – du même sang – de même vertu amoureuse... Se taire et là-bas, vivre et jouir...
Que l'heure soit. Vienne l'instant. Tombe la cime d'allégresse, et crève le cri de profondeur. Où est le sol, où est le site, où est le lieu, le milieu, où est le pays promis à l'homme ?  Le voyageur voyage et là... le voyant le tient sous ses yeux...
Où est l'innommé que l'on dénomme. Où est le fond ? Où est le mont amoncelé d'apothéose, où vit cet amour inabordé ? A quel accueil le pressentir. A quel écueil le reconnaître ? Où trône le dieu toujours à naître ? .../...
Où gît mon Royaume Terrien ?   .../...
Louange à l'ivresse de l'esprit... Que l'homme s'ouvre à toute la nature...  .../...
Par les forces visibles et non vues, par les vallons irrespirés, je t'adore Thibet, Château du monde.  .../... Je te nomme et dis mon Outremonde.
Pour tes pouvoirs d'immensité, acculés par le poids de la terre et les poussées...
Avec tes neiges, tes Hauts, tes vallées... Ton poids, ton pouvoir spirituel... Ton majestueux pouvoir et tes immenses forces potentielles suspendues là-haut entre Ciel et Plaine... .../...  Moi seul en route vers le Divers, vers toi-même haut – vers le plus étrange et le plus inaccessible... Vers Elle que je n'atteindrai pas. »

                        
Gérard le Gouic (Poème de l'île et du sel) :

« … Ici
Les iliens vivent
l'horizon à hauteur de coeur,
Des blessures de mer dans les mains.

Ici
Le jour devance la montée du soleil
Comme si la lumière
Etait un brouillard de mer
Où les franges de l'île.

Ici
La mer en hiver
S'habille en bretonne :
De velours noir
De blanches dentelles.

Ici
Le sel et la lumière
La mer, les phares, le temps
Plaquent l'île au ras du ciel.

Ici
L'île ni le temps
N'entament l'océan.

Ici tout se superpose :
La mer, le ciel
Le cercle à plat du soleil,
Les nuages et l'écume autour des rochers
Le sel
Seule l'île déchire.

Ici
L'envers du vent
Se lit dans la mer
Seule l'île
Est sans miroir ni contraire... »

Yvon le Men :  Partir (extraits) :

...Partir
S'il vient sauras-tu le prendre le navire annoncé par les cinq océans
Sauras-tu éviter les vagues qui viennent mordre le rivage
L'écume dans la gueule blanche à faire reculer la nuit
Pour que le jour ne s'achève jamais
Pour que tu ne te reposes plus
Il y a tant à faire sous le soleil

S'il vient sauras-tu l'ennoblir ce bateau
Décroche un croissant de lune
Et voici une coque longue et fine comme une goélette
Taille quelques rayons de soleil
Et voilà un fier trois-mât qui relève la tête
Saisis une étoile filante en vol
Et tiens bon la barre aux cinq épines de lumière
Déchire la queue d'une comète
Et mets toutes voiles de feu dehors

Vers le Nord
Au pays des couleurs bleues où la neige est blanche
Où les troupeaux de rennes traversent les vallées qui descendent dans les fjords
Nous donnant la mer à la bouche
Vers le Nord où vagabondent les poésies
Qui nous entraînent dans les pays du beau et du bon

Pars comme se baladait le nain sur l'oie sauvage
Tu prendras le premier oiseau qui dépliera ses ailes devant ta maison
Ses plumes racontent que dans le froid il y a une odeur de fumée
Une main qui désire la tienne
Des moufles en laine de toutes les couleurs qui galopent sur la prairie

Ecoute le chant des bâtisseurs de cathédrales
Leurs voix maçonnent des fenêtres dans nos coeurs
Leurs mains nous montrent les épaves des châteaux de sable
S'agenouillant à la marée
Implorant la princesse à la robe d'écume
Pour qu'elle revienne du nouveau monde
Nous raconter des histoires à dormir debout contre la vie... »

            Kenneth White            

« Géopoétique : Géo pour renouveler, par le sens et la connaissance, notre contact avec la terre...
Poétique  parce qu'il nous faut une expression dense, intense et respirante...

Un paysage élémentaire, chaotique, qui nous fait remonter jusqu'aux sources de notre être, de notre pensée...   ( in Bretagne)

« L'Armorique, c'est avant tout un paysage géologiquement puissant, un promontoire jeté vers le dehors et il y a de l'énergie archaïque dans l'air, l'esprit souffle. » (idem)

Ce qu'il nous faut avant tout en ce moment, c'est de l'espace, un grand espace de vie pour la méditation ultime...   (La route bleue)

Se tourner vers l'espace premier, le paysage archaïque, la réalité originelle des poèmes de la terre.
Il y a des navigateurs de l'esprit, des errants dans le désert de l'Occident, cherchant le détroit vers une mer ouverte...    (Conférence Juin 2004)

Il s'agit là (.../...) de se mouvoir, méditativement, dans un espace élémentaire et de pénétrer jusqu'à une conscience première ou à une sensation d'immensité...
(Atlantica)

Le rivage a toujours été le lieu de prédilection des poètes... (Cahier de géopoésie N° 4)

J'ai marché en ce lieu en homme qui aime les voies et les vagues du silence...
J'ai marché dans ces lieux...
Toujours ici à suivre les lignes, toujours à regarder dans la lumière. »   (Finisterra)

Littoralité : Homme de l'estran qui a le sens du « rivage » ( zone indéfinie entre terre et mer.) Frontière poreuse...
L'estran, le rivage ça avance, ça respire et ça se déploie...
(Conférence Université Paris VIII juin 2004)

Poète de la limite comme Taliesin...
« Je te salue, poète des limites, homme aux os de brume... » (Les Bretons de Strathclyde)

« La poésie telle que je l'entends parle du monde blanc. » (Approche du monde blanc)

« La poésie implique l'abolition des limites et une grande pureté... »

« Il me faudra aller plus loin dans cette nuit, entrer plus avant dans cet espace inédit, dépasser en desperado limites t frontières. Trouver, qui sait, la source d'une autre lumière. »   (Le Testament d'Ovide)

« Le ciel s'est brisé et la terre dans la mer lavée est diamant toute entière. » Atlantica

« A présent il cherchait une île, mais ne s'était jamais aventuré si loin, si loin dans le Nord, aux confins du monde où plus rien ne restait que la mer et le vent...
Un poème plein de mer rude et de lumière.
Oh ! Les mots pour cela, les mots pour une aurore !...

Et ils ramaient, plus loin, toujours plus loin vers les blancheurs inconnues...  .../...
… Vers un poème pluriel. »    (Atlantica)   K White

                Mystérieux Continent  :  Bran du

L'homme a tracé des cartes,
D 'innombrables portulans,
Mais que sait-il vraiment
De son propre continent,
De ses mers intérieures,
Des rivages de son sang ?...

La neige heureusement a pouvoir de remettre tout à blanc !...

Le sage n'est que passant...
Traversières, sont les saisons...
La vie n'est qu'une embarcation...
Le temps, lui-même, flottant !...

La sagesse a ces mots pour que flotte le bateau :

«  - Vous n'êtes que de passage
Mais le voyage ne cesse
Bravant le destin, concédant au hasard
En traçant son chemin entre brumes et brouillards...

S'attarder sur l'estran,
Prendre bain en lisière,
Ne mesurer en rien l'océan,
S'entretenir de la lumière...
Cela suffit à tout passant !...

Bonheur d'un paysage que désertent les couleurs...

Le regard glisse sur le blanc,
Se précipite dans le blanc,
Se laisse emporter dans l'extrême douceur...
Lors blanchit la pensée
Qui se pose dans l'espace
Comme l'écume sur le temps. »...

Etre cela qui est
Suffit pour le vivant !

                Les Frères de l'Estran   : Bran du

Hommes des estrans, arpenteurs de rivages,
Hommes bleus auréolés de blanc et de gris,
Vous vous tenez dans l'aubier et la sève
En des lisières de sel et d'écume
Secouant et lavant les plumes du voyage
Dans l'eau douce d'un étang...

Rudes sont vos mains aux algues ruisselantes ;
la grève de vos fronts scintille aux minuits...

Vous êtes du « Rendez-vous »
Au parcellaire du temps
Conciliant la pierre et l'étoile
Jurant de par des dieux que taisent les « sans racines »...
Vous arrachez au feu la langue des origines,
Vous tutoyez la lune embrassée sur la bouche...

Coude à coude, appuyés sur la balcon du monde
Vous caressez l'échine rouge du silence...
L'horizon se dénude et votre esprit de même...

Dans l'aube incendiée des îles larguent leurs nuages
Et l'ancre de vos mots se relève à midi...

Dans les bordées d'ajoncs et de bruyères,
Dans la frange des schistes, parmi le granit en prière,
Se mêlent vos songes aux voiliers impétueux...
L'aurore en vos yeux fait plus que femme ou que mort...

Vous êtes d'amplitude à la proue des attentes
Et s'étravent vos rêves dans le houleux des flots...

L'Ouest est en vous... (Une rose ensanglantée)
L'Ouest en son seuil, aux margelles du vivre...
Ici, vivant, pour rameuter l'ailleurs,
Vous espérez l'oiseau de toutes vos ramures...

La voile tendue de vos chants cingle la mature...
Vous halez haut le coeur le cordage des mémoires...

Cap au Nord ! Et s'oriente l'aiguille au mitan de vos chairs...
Cap au Nord !
C'est alors que la neige de vos fronts décline son hiver aux portes de vos dires...


                L'horizon... :  Bran du

L'horizon, c'est quand plus rien ne monte ou ne descend,
Quand se stabilise la ligne de démarcation,
Quand le trait est tiré entre ce qui s'additionne et ce qui se soustrait...
L'espace signifie son équilibre, sa plus juste répartition...

Etrange balance horizontale pour signifier la verticalité de l'union !...

Face au vide, aux étendues vierges, aux espaces infinis et uniformes, le moindre mouvement, la moindre lueur est une manifestation qui trahit la présence d'une âme...

Ce qui importe c'est l'instant de la « visitation »...

Cela s'annonce par une ambassade de souffle et de lumière...

On se sent enroulé entre le blanc et le bleu...

Notre pensée fait des vagues sur une grève tout à sa jouissance...

L'infini s'étire et nous aspire contre ses flancs...

Le ravissement, c'est de savoir là où il est d'usage de méconnaître...

Le rideau tiré, il faut rentrer avec au fond de sa poche un peu de ce tissu découpé dans l'étoffe lacérée du ciel...

La vie demande de plonger dans les ténèbres pour y enceindre un corps de lumière...


            Le Fou de Bassan : Bran du

Quand le ciel et la terre s'en viennent à se confondre
La lumière qui s'éteint est un cri qui s'estompe...

C'est simple
Il y a ce qui est en-dessous
Et ce qui est au-dessus...
Pour l'instant on peut encore parler de ciel et d'océan...
Ce qui importe, c'est ce qui se tient, ce qui se passe au-delà de l'horizon...
C'est cette étendue sur laquelle ricoche ma vue, c'est cette contrée inconnue
Que seule ma pensée peu investir très empiriquement...
Il me faut imaginer d'autres territoires, d'autres royaumes terraqués ;
De ceux que l'on ne peut pénétrer définitivement qu'aux sorties mortelles de ce monde...

Qui trouvera la première marche de l'escalier mouvant du ciel ?
Qui se glissera dans les fous courants d'un sillage éternel ?

On ne peut prétendre s'embarquer sans laisser quelque chose de soi de ce côté du rivage...

Des masses, des formes, des lignes, des ombres, des couleurs, des ailes, des nuages, des lueurs et des nuées...

N'être en cet instant qu'un Fou de Bassan et mettre tout son coeur dans l'abyssal plongeon...
Il sera bien temps, toujours temps, de revenir au jour, de rejaillir dans la lumière !...



17/01/2013
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