LE PAYS D'ENFANCE / ODE A LA BRETAGNE REFLEXION ET BARDI BRAN DU 2016 01 09 SEPT
Le Pays d'Enfance.... Réflexion, hommage et souvenirs Bran du Sept 2016
« C'est peut-être l'enfance qui approche le plus de la « vraie vie » ; L'enfance au-delà de laquelle l'homme ne dispose, en plus de son laissez-passer, que de quelques billets de faveur ; l'enfance où tout concourait cependant à la possession efficace et sans aléas, de soi-même. »...
André Breton (Manifestes du Surréalisme)
Du rapport, de la relation que l'on instaure, que l'on entretient avec son « lieu de vie »...
Le pourquoi d'un « attachement » essentiellement basé sur l'enfance que l'on y a vécue, mais aussi par rapport à une Tradition alliant art, nature, culture, philosophie et spiritualité...
Rien ne peut effacer un « pays d'enfance » et les multiples imprégnations conscientes ou non qui façonnent peu à peu un jeune individu disposant de la plus grande liberté possible pour empreindre le paysage de ses joies et de ses jeux...
Mégalithes des Côtes d'Armpor
Photos bran du
Quand on a grandi, heureusement, innocemment, merveilleusement grandi, entre une mer proche et une mère plus éloignée, mais cependant bien présente dans le cœur et les pensées, on ne peut, dans ce berceau doublement matriciel, que s'épanouir et jouir de tous les instants accordés dans le déroulé d'un temps bienveillant et bienfaisant à votre égard...
Ce fût un temps « d'heureuses sauvageries » , d'une immersion permanente au sein du monde marin et champêtre faite de découvertes et d'apprentissages parmi les plus divers et les plus stimulants...
Nommer une fleur, un insecte, une algue, un poisson, une herbe marine ou des prairies, un arbre, un champignon, un coquillage, cela s'acquiert par expérience au temps juvénile de l'âge...
Cela fait dépôt dans la mémoire et permet encore, bien plus tard, de fleurit l'hôtel des beaux souvenirs...
Ce sont cinq années de bonheur que d'avoir eu pour habitat et demeure la « Maison de Bretagne »....
On absorbe alors, par tous les pores de sa peaux, la rumeur des flots, les rythmes et les cycles, le chant des saisons, les marées qui se succèdent de basses eaux en mortes eaux, d'équinoxe en équinoxe et, du monde paysan, le calendrier et les travaux....
Plus que l'Ecole confessionnelle et obligatoire, c'est « l'école du renard » qui vous enseigne les bases, les fondements, d'une présence au monde dont l'utilité et le sens ne se dévoileront que dans l'âge adulte...
Coucher de soleil sur l'île de Batz
Cette « enfance » ne cherche pas encore à « expliquer », ne se pose pas les questions dites « existentielles » qui viendront macérer à leurs heures dans le tonneau des pensées...
C'est une sorte de « rituel » plus ou moins ordonné selon les jours qui se succèdent, mais qui a, déjà, ses « habitudes » avec, aussi, un volet conséquent « d'improvisations »...
Quelle chance de pouvoir « se nourrir » avec les dons de la nature, de s'adonner aux cueillettes saisonnières (salades et fruits sauvages...) de poser, régulièrement, sur la table des grands parents, crabes, homards, minards*, crevettes, coquillages et poissons...
Trouver en la nature sa saine et prodigue nourriture fût, pour l'enfant que j'étais alors, un énorme plaisir, un jouet perpétuel, une émulation de tous les instants...
Faire « connaissance » de tout cela m'amènera, par la suite, à exprimer une éternelle reconnaissance pour tout ce « bien », ce « bon », ces dons, prodigués à satiété...
Acquérir si jeune une telle liberté amène par ailleurs au sentiment de « responsabilité » et au sens de l'organisation qui permet de rendre compatible des conventions sociales et familiales avec un temps libéré de celles-ci...
C'est aussi faire apprentissage des « dangers » et non des moindres quand il s'agit de se confronter aux lois de la mer, à ses humeurs voire à ses colères... C'est aussi s'initier au « respect » de ces lois, les comprendre et les intégrer dans sa façon d'être et d'agir...
C'est faire apprentissage de cette vie présente dans les plantes, les arbres, les animaux, les grèves, les landiers et les prairies...
Je peux dire aujourd'hui que chaque jour me fût « leçons »...(Parfois plus ou moins suivies !)...
Ile de Molène
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Ce que nous visons dans notre jeune âge peut être le plus précieux de tous les héritages, mais, tout autant, le plus terrible des fardeaux selon l'environnement et les conditions d'existence qui furent les nôtres....(Très inégal est pour chacun ce « dépôt »!)...
Le sentiment d'amour qui, peu à peu, nous fonde, nous forge, nous façonne, nous empreint, nous enseigne progressivement, nous « ouvrant au monde » dans une dimension sensible, émotive, poétique et intelligente, va naître au sein de cette enfance ; sa sève nous aidera à faire croître et s'épanouir « l'Arbre de notre Vie » et cela est d'une importance capitale et vitale pour le devenir de chacune et de chacun selon que ce sentiment sera sustenté ou carencé, selon ce qui sera véritablement, authentiquement et généreusement offert de ce don fait de forces, d'énergies et de lumières...
La façon dont nous aurons vécu notre enfance et adolescence sera déterminante pour le bon, l'heureux déroulé de notre vie d'adulte
La part la plus conséquente des traumatismes qui affectent un nombre conséquent de nos contemporains provient des conditions négatives dans lesquelles s'est déroulée notre enfance et de la nature des liens qui existaient alors dans notre environnement familial...
Il y a là de terribles et redoutables séquelles qui, faute d'avoir été lucidement, clairement et posément identifiées, gérés et « intégrés », contribuent à ravager de douleurs, d'angoisses et de souffrances ; des êtres perclus et perfusés par de douloureux souvenirs, plus ou moins conscients, mais toujours dramatiquement présents...
Le site de "Croquelien" domaine des Fées Margot
Lorsque l'on a baigné dans son jeune âge dans un univers fait de violence, d'indifférence, de mensonge, d'hypocrisie, de colère, de jalousie, de mauvais traitements, d'abus sur la personne... on ne peut qu'être durablement affecté et « encombré » de cela, de ce poison sournois qui circulent en nos veines, en notre cœur et en nos pensées et qui grève déjà (hélas!) le devenir et la nature et la qualité de nos futures relations humaines...
Je n'ai pas eu à connaître de telles affres car mon enfance fut véritablement « heureuse » et je n'aurai qu'un souhait ; c'est qu'elle puisse être la même pour tous les enfants du monde...
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En Brocéliande
C'est dans l'exil que l'on prend pleine conscience d'une absence qui nous emplissait de sa présence comme l'eau du ciel remplie la fontaine de vie......
Il m'a fallut « quitter » provisoirement mes territoires d'enfance, mes grèves et mes landiers, mes usages et mes pratiques maritimes et champêtres pour un environnement urbain aux antipodes de mes espaces de liberté et de découverte...
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La découverte et la pratique de la Poésie, de la Musique, du Chant, de la Danse, de neuves Amitiés, et une première expérience religieuse aideront à combler le grand vide laissé en moi au sein de cet « exil » et renforcera, ô combien, « l'Amour d'un Pays » qui s'étoffera peu à peu avec le recouvrement opéré de sa « Mémoire » historique, culturelle et traditionnelle...
La Bretagne (ses cinq départements historiquement constitutifs de celle-ci) à un passé des plus riches et les ouvrages et documents ne manquent pas pour relater en détail celui-ci...
Elle fût habitée depuis fort longtemps, dans ses îles proches et sur le continent...
Au Néolithique des populations se sédentarisent et occupent les lieux qu'elles modèlent et façonnent peu à peu...
Le mégalithisme se répand et se diffuse le long de ses côtes et à l'intérieur des terres et souvent en des lieux élevés où seront dressés de nombreux monuments répondant à des rites funéraires, des assemblées communautaires et à des besoins de compréhension dans le domaine astronomique (la lecture de la « carte du ciel »)
le cahos du Toul Goulig
Chêne près de Mur de Bretagne (Estimé entre 10O0 et 1400 ans d'âge)
Ce sont plusieurs centres religieux, des sanctuaires de grande importance et de grande fréquentation (on s-y déplace parfois de fort loin) qui expriment une ferveur, une croyance et une espérance monumentale et qui se veut « durable »...
Ce sont des prouesses techniques associées à un fort sens de l'organisation et à une foi autant profonde qu'élevée qui permettent
de tels ensembles, souvent « orientés » et « chargés » symboliquement...
Puis ce seront les Celtes, leur société trifonctionnelle, leur cultes, croyances, rites, ainsi que leur calendrier festif et agropastoral, leur génie propre, leur art, la qualité de leurs artisans, leur capacité à innover, créer, imaginer et inventer, leur immense curiosité pour tous les êtres et les choses, leur sens aigu de l'honneur, de la parole de vérité, leur soif de découvertes, de voyages, d'aventures, leur audace, leur courage face à la mort, leur sagesse (l'ébauche d'une véritable et profonde philosophie), et leur spiritualité cohérente dont la primauté s'impose au monde matériel et corporel en ce monde et en « l'Autre-Monde »...
Les chemins serpenteaux de la Connaissance et un hasard inspiré et guidé ainsi qu'un féminin dépositaire d'un sacre très ancien m’amèneront à leur rencontre et à une initiation armoricaine et celtique en forêt de Brocéliande en une source matricielle dont les eaux n'ont jamais cessé de se répandre et de féconder les rivages de mes âges et de déposer en mes sens, en mon cœur et en mes pensées un limon des plus fertiles...
Comment lors ne pas « aimer » ce qui s'est déversé avec « amour » en tout votre être, irriguant celui-ci, ses terres arides et ses zones désertiques, d'une eau abondante et bienfaisante ?....
Je suis volontairement, librement, lucidement, consciemment et jubilatoirement « attaché » à cette Terre qui est aussi une Mère et à cette Mer qui berce, de ses marées, la plage étendue et consentante de toute mon existence...
Elle sont toutes deux, Mère et Mer, un lait perpétuel jaillit du sein de l'Univers vers lequel mes lèvres s'élancent...
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Hêtre en Brocéliande
Dans la vallée de l'Aff en Brocéliande
Ce pays ; c'est le feu flamboyant de mon âtre, c'est l'eau de mon puits ; ses souvenirs enfouis me sont douces souvenances, flots de miel jamais taris...
Il est cette fidèle présence, cette onde qui vibre en l'infini
Et le chanter me suffit pour combler le vide et l'absence...
Il est la sève de mon Arbre de vie, sillons pour mes semences,
Il est pays de féerie et sa magie m'est quintessence...
Par lui naît et fleurit la parole qui dit l'alliance, le son qui s'élève, vibre et frémit...
Par lui s'instaure l'exacte correspondance et tout cela qui réconcilie...
En lui mes élégances, par lui mon éloquence, mes luttes et mes défis...
Plus qu'une « patrie », c'est une « cosmogonie » que mon appartenance qui sans cesse, en de hauts lieux, prie et communie...
Ailleurs, en des territoires sans souche, sans source, sans puits ni racines, règnent le mépris, le dénie, la duperie, l'avanie, la menterie, la vilenie, (un ramassis de salmigondis) ainsi que tout un lot d'indifférence, d'inconscience, d'inconstance et d'inconsistance.
Mais ici la possibilité offerte de vivre en équilibre et en harmonie des instants porteurs d'éternité, de pétulance, de sapience, de concordance, de connivence et d'évidence, tout cela qui fait enfin jour en nos si longues nuits...
Ici s'opère la jonction, la connexion, qui concélèbrent l'union, la « cosmunion » entre soi, chacun, l'autre, les autres, le vivant et l'infini...
Ici est ma demeure, mon habitat, mon amoureux séjour, mon granitique logis...
Ici sont mes promontoires et mes envols, mes celtes rêveries...
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C'est vrai, à l'origine, je ne suis pas « d'ici », pas de ce « Pays »,
mais il est totalement en moi comme je suis pleinement en lui...
Par lui, je suis devenu druide et barde ; de l'Antique Tradition j'ai fait souvenance et recouvrance...
Je porte cela en moi comme un flambeau, comme une étoile qui luit, comme un sachet de semis, comme une eau de jouvence...
Je sais de ses flots et de ses ruisseaux la chantante symphonie...
Je sais son immense sagesse où dansent et chantent tant de folies...
Je sais les fléaux que sont la peur et l'ignorance, je sais de l'homme la ladrerie et l'avanie , l'incurie et la supercherie, mais je sais aussi la braise sous la cendre et le feu qui en jaillit quand l'être prend enfin conscience au foyer éteint de sa vie et fait acte de reconnaissance en boutant flamme en l'infini !...
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Ce pays ne veut de souillure sur ses armoiries...
Pour le devenir de l'humanité il a donné, sacrifié, des centaines de milliers de ses enfants chéris...
Il a offert, sans compter, son sang, ses rêves, ses espérances...
Il, a servi de son mieux l'avenir de la France ; (une France qui, entre nous soit dit, lui interdit l'usage officiellement perpétué et transmis de son parler, de ses langues, sous le faux prétexte de danger pour l'unité nationale, soit d'un ensemble compromis qui ne saurait supporter ni même tolérer, en terme de patrimoine national, la complémentarité et la différence !)...
L'absurdité, la bêtise, il est vrai, sont devenues la « référence ! »..
Ce pays castré en ses dits, mais qui formule et exprime de toutes ses voix, de tous ses choeurs, la réalité et le légendaire de toutes ses splendeurs, de tout son génie, est devenu, au quotidien, le mien et c'est mon « âme-soeur » que ce « Pays » là...
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C'est « mon Pays », il est de mes pensées et de ma chair. Il me procure « forces, énergies et lumières », étoiles en mes nuits...
En lui, j'ai pris naissance ; naissance infinie...
Deux harpistes au sommet du Méné Gwen
*Minards (pieuvre en gallo).