LECTURES POUR LA SAMAIN : AUCLAIR / W B YEATS / MICHEL CAPMAL / BRAN DU 2016 18 10 OCT
ESPRIT DE SAMAIN.... Bran du Octobre 2016
« Avec l'eau folle de la rivière d'argent, l'été s'en est allé.
Alors Lug, le flamboyant Lug à la longue main à chanté à pleine voix...
Le temps est venu de ranimer les foyers d'ici-bas au feu qui, là-haut, embrase la montagne...
Et le temps est venu où s'ouvre, l'espace d'une nuit, les portes du monde souterrain, le pays des dieux et des morts...
Accourez. Accourez. Accourez tous ! Nos pères, nos frères et nos fils ; Accourez toutes, nos mères, nos sœurs, nos femmes et nos filles …. »
Auclair (Bran Ruz) Casterman Editeur
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« L'imagination humaine est divine quand elle se souvient d'où elle procède. » Pierre Leyris (Préface à l'ouvrage de William Butler Yeats (Prix Nobel de littérature).
Willian Butler Yeats : La Crucifixion du paria (extraits)
Cumhal :
... « Je voudrais que le vent rouge des Druides eût flétri dans son berceau le soldat de Dathi qui apporta des terres barbares l'arbre de mort... »
… « O couarde et tyrannique race des moines, persécuteurs du barde et du jongleur, ennemis de la vie et de la joie ! O race qui ne tire pas l'épée ni ne dit la vérité ! O race qui amollit les os des gens à force de couardise et de tromperie ! »
Le Père abbé :
«-Si nous ne faisons rien à son encontre, il va enseigner ses malédictions aux enfants des rues et aux filles qui filent aux portes... »...
Un autre frère :
« -Irais-je donc lui donner des mottes sèches, une miche fraîche, de l'eau claire dans une cruche pour le bain de pieds et une couverture neuve, et le ferais-je jurer par le bienheureux Benigus ainsi que par le soleil et la lune, afin qu'il soit lié de tous les côtés, de ne pas dire ses vers aux enfants des rues non plus qu'aux filles qui filet aux portes ? »...
Le père abbé :
... « -Si nous n'en finissons pas avec lui, un autre s'en chargera ; comment manger et dormir en paix tant que des hommes comme lui courent le monde ? »...
« Peux-tu me nommer un seul (de ces bardes et de ces jongleurs) qui ne soit païen dans son cœur, et ne languisse toujours après les fils de Lir et Aengus et Bridget et les Dagda et Dana la Mère et tous les faux dieux des anciens jours ; faisant sans cesse des poèmes à la louange des rois et reines des démons ? »...
Cumhal :
« -Ami, mon âme est en effet comme le vent et son souffle m'entraîne de-ci, de-là, en haut et en bas, et elle me met beaucoup de choses dans l'esprit et hors de l'esprit, et c'est pourquoi on m'appelle le Fougueux Cheval Sauvage. »...
Cumhal (levant les bras au ciel au passage des oies sauvages) :
« -O grandes oies bernaches, attendez un peu, et peut-être que mon âme fera voyage avec vous vers les lieux déserts du rivage et la mer indomptable. »...
Les moines emmènent Cumhal, portant la croix qu'il a du tailler lui-même, vers le sommet de la colline dite des suppliciés. En cours de chemin Cumhal demande plusieurs fois une faveur :
celle de le laisser jongler, de tirer des grenouilles de ses oreilles. Une seconde fois, il sollicite des moines qu'ils écoutent les belles histoires (celle de Conan le Chauve sur le dos duquel poussait une toison de mouton, celle de Deidre aux seins blancs et des fils d'Usna), mais les moines après avoir été ravis de tels prodiges et de tels chants le battent pour avoir réveillé des désirs oubliés dans leur cœur.
Il sollicite alors avant de mourir un dernier délai qu'on lui refuse, devant ce refus, il proclame bien haut :
« - Je ne demande plus de délai, car j'ai tiré l'épée, et dit la vérité, et vécu mon rêve, et je suis content. »...
Il obtient cependant de faire un dernier pas et sort un peu de nourriture de sa besace alors que des mendiants et des pauvres se pressent autour de lui.
Cumhal : « -Lequel est le plus pauvre d'entre vous ? »
Et tous de clamer alors leurs malheurs.
Cumhal de répondre : « -C'est moi qui suis le plus pauvre, car j'ai cheminé sur la route nue et à la lisière de la mer... Et j'ai été d'autant plus seul sur les routes et au bord de mer que j'entendais dans mon cœur le bruissement de la robe ourlée de rose de celle qui est plus subtile qu'Aengus au Coeur subtil et plus pénétrée de la beauté du rire de Conan le Chauve, et plus encline à la sagesse des larmes de Deirdre aux seins Blancs et plus exquise que l'aube qui se lève pour ceux qui sont perdus dans le noir. »
Cumhal est alors crucifié. Les loups et les oiseaux dévorèrent son visage et ses pieds...
...
Voici donc la fin tragique d'une « Homme-Chevalier » « Portant le visage d'un de ceux qui sont apparus que rarement en ce monde, et toujours parce que ce monde était en crise, rêveurs qui doivent accomplir ce qu'ils rêvent, hommes d'actions qui doivent rêver ce qu'ils font. »
« Ceux-là qui aspiraient toujours à des tâches plus ardues au service de la vérité qui ne peut être comprise que dans l'intime du cœur. »
Yeats fera dire par l'un de ces « preux chevaliers » initiant un jeune enfant aux mystères des « Anciennes Lois » :
«- Pourquoi crains-tu les anciens dieux qui ont rendu puissants au combat les épieux des pères de tes pères, et les petits hommes qui sortaient la nuit du fond des lacs et qui chantaient parmi les grillons du foyer ? Par nos temps pervers, ils veillent toujours sur ce qui fait l'exquise beauté de la terre. »
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Ce merveilleux ouvrage consacre une bonne partie des récits qu'il contient à un personnage fabuleux ; « poète ayant le vagabondage au coeur », appelé Hanrahan le Roux. A défaut d'entendre ici sa merveilleuse histoire,nous nous contenterons aujourd'hui de l'un de ses chants lequel constitue l'une des pétales de la « Rose Secrète » :
Chant de Hanrahan le Roux (extraits) :
« Les vielles aubépines brunes se cassent sur les hauteurs au-dessus de Cummen-les-Grèves.
Dans un âpre vent noir qui vient de la main gauche ;
notre courage aussi se casse comme un vieux chêne par un vent noir et meurt.
Mais, chacun d'entre nous a caché dans son cœur la flamme que jettent les yeux de Cathleen, fille de Houlihan...
Le vent rameute les nuages ai-dessus du Knocknarea.
Et roule le tonnerre sur les pierres malgré tout ce que Maève peut dire, des colères pareilles à des bruyants nuages ont fait battre nos cœurs ; mais chacun d'entre nous s'est courbé bas, très bas, et a baisé les pieds tranquilles de Cathleen, fille de Houlihan... »
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Autres extrais de La Rose Secrète (W.B. YEATS)
« ...Et il leur annonça le retour des Dieux et des choses anciennes ; et leurs cœurs, qui n'avaient jamais subi la présence ni la pression de notre temps, mais seulement celle des temps reculés, ne trouvèrent rien d'invraisemblable dans quoi que ce fût qu'il leur dit, mais acceptèrent tout avec simplicité et furent heureux. » …
« Il enseignait en secret que certains autres et en nombre toujours croissant, étaient élus, non pour vivre, mais pour révéler cette substance cachée de Dieu qui est couleur et musique et douceur et odeur suave. »
« Combien de choses ont perdu pour nous leur importance après avoir jadis ébranlé le monde ? »
« Dans la danse ! Personne ne doit rester en dehors de la danse !
Dans la danse ! Afin que les dieux puissent leur faire des corps avec la substance de nos cœurs. »
« La pensée leur vint que l'alchimie était la distillation graduelle du contenu de l'âme, jusqu'à ce qu'ils fussent prêts à dépouiller le mortel et à revêtir l'immortel. »
« Changer le plomb en or, la lassitude en extase, l'obscurité en Dieu... »
« Les « Sidhe » passent toujours dans tous les vents et dansent et jouent...»
W B YEATS la Rose Secrète
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Vers Hyperborée... par Michel Capmal
Nous sommes constitués de la matière même de ces régions ultimes, de ces régions-limites...
Cette matière est aussi une lumière blanche, le rayonnement invisible de la contrée du songe...
Passé les vestiges des dernières et inutiles fortifications, voici toute l'ampleur océanique.
Dehors et dedans ne sont plus qu'un seul espace...
Guerriers exténués, nous allons nous réveiller oiseaux hyperboréens ; oiseaux messagers.
Tel est notre devenir immédiat.
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Jeune fille de Samain Bran du 1999
La flûte de roseau
Le marais au bord des lèvres
La robe des sables
La dentelle des flots
Les pas souples de la jeune fille dansant dans l'arceau du temps et dans les entrelacs de l'espace...
La jeune fille ayant jupe ourlée d'algues et d'écume ;
Là au seuil du monde ; là à la lisière des « Sidhe »...
L'épervier sur la lande poussant les nuages de ses ailes et tournoyant dans le flamme de son sang...
Des étoiles sur la mer et dans le cœur un étrange luminaire irradiant de tous ses feux la mouvance des eaux...
La jeune fille toujours enjouée et légère, portant branche de pommier et fleurs sur la branche, et pommes sur la branche...
L'étoile chante au cœur, chanson douce et aimante ; très douce, très aimante...
Et le cortège s'en vient du fin fond de la nuit portant torche vivante...
Et le cortège s'en vient, la feuille de chêne battant les flancs et les hanches ; les femmes corbeilles dans la main chantent et aussi dansent...
C'est le chant de la Samain qui rythme les pas et donne la cadence...
Femmes aux blancs seins et druides en robe blanche... Ils vont portant offrande ; offrandes de Samain....
Noix, noisettes et pommes pour le festin...
La joie et l'amitié pour resceller l'alliance...
Le cycle recommence offrant nouveau chemin
à ceux et celles qui se donnent le cœur et la main
et qui, aux déesses et aux dieux, éternellement, se fiancent...
La jeune fille va, elle aussi son chemin, légère en sa mouvance,
et dans le ciel s'élance, ayant étoile au sein !....
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