LES DITS DU CORBEAU 2000/2017 (SUITE) CAROLAN / LA VAGUE BLANCHE
Les Dits du Corbeau Bran du 2000/2017
Carolan
« - Où t'en vas-tu, beau princesses si tôt matin avec ton orgueil et tes chiens, couleur de brouillard et de brume ?
Crois-tu le cerf de Mael-Sidi si peu au fait de tes javelots et si pressé de geindre sur la mousse ?
Beau seigneur, écouteras-tu la vieille Maeva ; celle qui s'en va, les lèvres sèches, puiser à la fontaine du jour ?
Flux et reflux, je les connais bien dans l'amplitude de mes équinoxes et de mes solstices et dans les mortes eaux de ma vieillesse...
Le faucon a tourné sept fois dans les replis du ciel...
La loutre n'a pas joué dans les remous du soleil...
Depuis trois lunes est dressé le festin et toi tu coures les laies et les landes comme le renard après le lièvre...
La fièvre hante ton regard et l'ivresse te prend comme le vent dans les feuilles...
Aveugle tu es, dans l'éblouissement de ta fougue et de ta hardiesse...
Ton cheval transpire, la sueur ruisselle sur son poitrail gris ainsi que l'ombre qui s'attache aux cavales solaire de ta course...
Prend garde, beau seigneur, toute aurore à son crépuscule...
A trop courser la mort celle-ci fera sienne ta couche de genêt et de bruyère...
Tu es bien fier beau prince, mais l'été viendra avec sa faucille dans les blés ; l'automne viendra de même qui fera tomber la noix et la pomme et l'hiver s'installera figeant la vie dans ses glaces...
Hautain tu es dans ton armure qui me toise...
Mais, dans les joutes du temps, la mort nous met à terre...
Prend garde ô prince, des forces qui nous terrassent...
Etrange est la ramure qui te pousse là entre tes oreilles...
Hâtes-toi
N'entends-tu pas, comme moi, les trompes de chasse ?
M'est avis qu'avant midi tu vas avoir des chiens rouges à tes trousses !
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La Vague Blanche (White Wave)
La louve a étouffé le sanglier dans sa bauge d'or et de brume...
Dans le sanctuaire de feuille et d'écume la louve a égorgé le Grand Cerf sacré...
Flot de sang à la crête des vagues...
De pourpre est l'océan rugissant et la fureur des lames...
Des corps, jeunes et vieux, flottent dans le jusant...
Le fer à tranché la vie dans le sanctuaire des âmes...
Gisante est la blancheur maculée du rouge de la dague...
Rouge est le ruisseau, rouge la rivière, rouges toutes les eaux
où pourrissent les chairs...
Rouge la poitrine ouverte des femmes
Rouge l'enfant roulé dans son cordon...
Rouges les veines lacérées de la terre...
Rouge l'île et son immense brûlot
Hommes et femmes, prêtres et enfants,
hurlant dans l'enrobée des flammes...
La nuit ferme de l'avenir les paupières...
Rome a imposé sa voix et sa loi
Ordonnant à ces cris de se taire...
Rouge la ruche des abeilles, rouge le miel de la saison...
Rouge le blanc sein de la Mère....
Rouge la Vie ruisselant du Németon...
Rouge plus rouge encore, le cœur meurtri du sanctuaire...
Rouge le crépuscule et rouge l'oeil de lumière...
Il n'est plus de chants d'oiseau...
N'est-plus l'Arbre qui faisait centre...
De cendre est le bois qui faisait cœur...
Les embruns recouvrent de leur suaire
Le temple mis à bas...
L'ombre se déverse sur la clarté de naguère...
S'est éteinte la flamme de Mona,
Mais, demeure son éternelle lumière !...
(Mona ou Anglesey est une île au large de l'Ecosse dont la population regroupée autour d'un grand sanctuaire druidique fut exterminée en l'an 58 par une légion romaine constituée à cet effet.)