LES DRUIDES (SUITE) CONCEPT DOCTRINE PENSEE ET ORALITE COMMENTAIRES BRANDU 2016 04/04 AVRIL
Les Druides (Suite) Note, étude, commentaire Bran Du Avril 2016
A partir de l'ouvrage de F Le Roux et CH J Guyonvarc'h
(Ouest-France éditeur)
Des concepts, de la pensée celto-druidique et de l'Oralité....
« La doctrine druidique, la matière de cet enseignement, nous échappent presque entièrement... Des idées directrices ont survécu... Il va de soi que ces idées qui expriment ou retiennent des concepts très clairs et des notions traditionnelles évidentes, ont pleine valeur doctrinale... »
F Le Roux et CH J Guyonvarc'h
Oui, pour des raisons bien pesées, les druides ont refusé de confier à l'écriture leurs concepts fondamentaux en laissant ceux-ci poursuivre librement leur évolution au sein des générations à venir...
(Et nous pouvons les remercier vivement de ne pas avoir laissé à notre disposition un « livre de recettes » ; une codification statufiée et pétrifiée de la connaissance...)
La pensée celtique à source d'infini et d'absolu ; elle ruisselle de berge en berge et de rivage en rivage le long du fleuve humain et ne saurait arrêter son cours devant les entreprises captatrices de l'Histoire et leur tentative d'asséchement...
Les Sages de l'ancienne Celtie ont d'abord puiser abondamment dans le Livre de la Nature, dans celui de l'Univers, les éléments constitutifs de leur « pensée » philosophique, culturelle, sociale et spirituelle....
A partir d'observations savantes, sapientiales, physiques des lois qui régissent le vivant, les cycles et les rythmes, ils investissent le domaine métaphysique et le langage analogique et symbolique pour l'appréhender tout en recherchant les correspondances cohérentes et symbiotiques entre Esprit et Matière, entre le visible et l'invisible ; le connu et l'inconnu...
Ils n'ont pas écarté les conceptions, approches, tentatives de compréhension, des hommes et femmes qui les ont précédés ;
ils ont prolongé, approfondi, complété, densifié et intensifié les premiers questionnements d'une humanité en marche et en recherche d'entendements majeurs...
Et pour cela ils ont apporté une dimension philosophique très signifiante et très déterminante dans les processus de compréhension des mystères de l'Etre et des choses...
Un sens aigu de l'équité, de l'équilibre, de l'harmonie, de ce qui sonne juste et vrai, les a amené à rechercher le bon accord, l'exacte concordance entre les mondes, l'adéquation, l'ajustement, les points d'unification, de complémentarité donnant Sens et Essence à un tout s'exprimant, se formulant, par ses parties et fragments dont l'humanité toute entière...
C'est ici la quête, la démarche essentielle et primordiale...
Celle qui donne sens à la vie en donnant à celle-ci sa sève, sa source, son humus, sa racine et son sang, mais aussi ses plus beaux songes, ses rêves les plus pertinents et ses poèmes les plus incarnés et aboutis...
Ne pas figer ce qui irrigue le vivant, le visible et l'invisible des ondes, flux, fluides, vibrations qui circulent en l'univers comme le sang dans les veines ou la sève dans l'aubier...
C'est là une volonté celtique bien affirmée...
La vie est un océan fait de souffles, de mouvances, de danses perpétuelles, de chorégraphies célestes et aériennes et ne saurait être ancrée à demeure, attachée indéfiniment à une forme et même à un concept...
L'artisan ou l'artiste Celte, initiée aux arcanes druidiques, a su parfaitement rendre compte de cela à travers une recherche à la fois des correspondances symétriques illustrant l'équilibre te l'harmonie et les libres et infinis entrelacs qui célèbrent les noces et les alliances d'entendement et qui font étoffe souple et légère, précieuse et émouvante d'un tissu vivant...
(De cela même dont nous sommes issus et tissu!)...
En privilégiant délibérément l'oralité par rapport à l'écriture les druides et druidesses se sont insérés dans l'onde et la flamme de Vie, dans l'immense Respiration du monde et de l'univers....
Ils ont offert à leurs lèvres le miel de l'Awen...
Solaire a été leur souffle, brises et tempêtes leurs paroles, danses des saisons leurs récits et vol migrateur leur désir « d'au-delà »...
L'écriture cependant n'a pas été absolument négligée, elle a été élaboré pour répondre, exceptionnellement donc, à des besoins magico-religieux bien précis et très encadrés par les sacerdotes qui ne confiaient celle-ci qu'à des initiés en ayant la connaissance et la maîtrise...(« Un langage demeurant la propriété des érudits... »)
Ce seront les « ogam » aux applications réservées et contrôlés...
Pourquoi le refus, chez les Druides, de l'emploi généralisé de l'écriture considérée, depuis, comme le moyen le plus commode pour échanger et transmettre ?
F le Roux et CH J Guyonvarc'h répondent ceci :
« …. La pensée réelle, active, dynamique, évoluant comme la vie dont elle est la part la plus subtile et la plus précieuse, ne peut se plier, ne doit se plier à des contingences telles celles de la fixation. »
« Ce n'est pas l'absence d'écriture qui a tué un tel enseignement, c'est l'irruption en occident d'une nouvelle forme de Tradition, en l’occurrence le christianisme, qui a fait du Livre la Révélation, la Vie et l'Exemple... »
« La culture celtique a ainsi respecté envers et contre tout le principe traditionnel immuable de la supériorité de la pensée sur la parole, de la parole sur le texte, et du texte sur l'image.... »
Relisons à ce sujet les Ancient laws Of Irland :
« Le « Senchus » (antiquité) des hommes d'Irlande, qui l'a conservé ?
La mémoire commune de deux anciens, la transmission d'une oreille à l'autre, le chant du poète, l'addition de la loi des lettres, la force de la loi de la nature, car ce sont les trois rocs sur lesquels reposent les jugements du monde. »
On ne saurait être plus explicite.....
En notre siècle l'image envahit l'espace de communication informant et désinformant tout autant qu'une écriture sujette à toutes les manipulations et ce, avec une profusion de paroles discordantes, contradictoires et arrogantes....
Tout un parasitage sonore et visuel qui ne peut que perturber le regard, la saine vision et l'écoute en empêchant le discernement des réalités cachées et masquées...
Règne donc de la confusion, de la discordance et de la dissonance et du mensonge institutionnalisé...
Soit tout ce que craignait le monde Celte à travers la dévalorisation, l'inversion pour tout dire des valeurs originelles, fondamentales et essentielles constitutives d'un rapport et d'une relation authentique, véritable, sincère, fidèle, respectueuse avec la Vie !...
Prendre Parole ; c'est puiser à la Source du Verbe de Vie !
Du moins cela devrait être ainsi afin que l'Etre soit pleinement au monde et accordé à celui-ci...
L'Ecriture, oui, certes, mais à défaut d'une transmission directe « de cœur à cœur, d'oreille à oreille, de poitrine à poitrine »....
C'est dire combien, sans mésestimer les apports concrets et efficients de l'écriture et les outils « modernes » tout en se gardant de leurs pièges, nous devons autant que possible redonner, restituer, offrir, à nos lèvres et à leurs vibrations leurs forces, énergies et lumières originelles et naturelles....
Et c'est là l'oeuvre des bardes !....