LES SENTIERS QUI MENENT A LA MER TEXTE BRAN DU (2020 10 03 MARS)
Oeuvre peinte de Christian Tual Photo Bran Du
Les sentiers qui mènent à la mer.... Bran du Le 10 Mars 2020
Texte inspiré d'une vidéo de Brieg Guerveno illustrant son C.D. : 'Vel pa Fefemp...(disponible sur Internet)...
.... Les herbes folles ;
Celles des dunes, celles des landiers
Les herbes ébouriffées ;
Ce sont elles qui forment la toison intime de la Terre...
Les vents affouillent cette intimité, en soulèvent jupes et jupons,
En froissent les corsages de genêts et d'ajoncs qui empruntent au soleil ses couleurs et ses rayons...
Rousses, fauves sont les fougères ployées par l'Ankou de l'automne...
Ici le silence s'étonne d'émettre autant de chants ; ceux de la mer, ceux de la gente ailée, ceux des criquets et des grillons, ceux des galets roulés de marée en marée, ceux des chardonnerets qui tanguent dans les haubans des chardons...
Parfois siffle le "Nordé" pour reprendre la chanson...
Ici, j'ai rendez-vous avec l'immensité, avec cette étendue qui est un paume ouverte qui vous invite à la saisir et à la suivre pour pénétrer l'espace tout votre corps frémissant...
Trois couples d'ailes planent au-dessus de mes pensées...
Certaines d'entre elles, séduites par la blancheur de l'écume, se fracassent sur les brisants... D'autres traversent les confins du songe et du rêve...
Ici est le lieu pour se tenir debout, dans une verticalité qui défie l'horizon et en déflore la virginité...
Si, comme moi, vous vous sentez parfois "perdus", brassés, égarés, ballotés parmi les tourbillons de l'existence, je vous invite à retrouver, en vous et sous vos pas, les sentiers qui mènent à la mer ; ces sentes caillouteuses et ensablées qui serpentent entre ciel et bruyères...
Ici s'élèvent des voix qui savent parler aux déesses et aux dieux, qui savent des cieux le foudroyant, l'enveloppant langage....
Ici, la Beauté fut enfantée dans un écrin de lumière...
Comme le faucon guette le sang et la chair, l'âme attend, de ses amants, l'ardente et la fervente visitation...
Stridents sont les cris des mouettes et des goélands qui sillonnent l'espace de leurs traits noirs et blancs tissant ainsi d'invisibles étoffes dont se recouvrent les vents et se parent les nuages...
Etre là, se tenir là, dénudé de corps et d'esprit, se "fiancer" avec la vie, puis en concélébrer les noces d'algues et de chardons bleus...
Ecrire lors dans le sable lisse et humide ce mot de sept lettres qui veut dire : "heureux"...
Ici le refuge des âmes qui ont déserté l'habitat désacralisé des femmes et des hommes imbus de matérialités, d'arrogances et d'illusions...
Se ré-accorder ici aux symphoniques saisons, se restituer cette essentialité dont nous ne savons plus porter les splendides prénoms... Et, de la vie reprendre les couleurs, le son et le ton...
Prendre ou reprendre conscience que "vivre" c'est "respirer" !...
Respirer de ce même souffle qui anime toute la création...
Respirer à plein poumons comme respirent les marées, comme respirent les quatre saisons aux quatre temps de l'Amour....
Toutes ces dunes "mamelonnées", toutes ces "toisons" hirsutes qui les recouvrent, toutes ces odeurs de café ou de caramel brûlés par l'été, tous ces rouleaux entremêlés, tout ce ballet de libres rémiges qui brassent l'air avec la mort qui rôde à l'aplomb des falaises, toute cette étendue serrée d'herbes et de broussailles trouées en leurs lisières par le passage des garennes sans omettre à cela le cri nocturne des chouettes effraies ayant nidifié dans les ruines d'un moulin éventré... tout cet ensemble de formes, de manifestations, de senteurs et d'expressions exalte et aiguillonne les sens... mais, pour autant que ceux-ci soient comme une grève offerte aux équinoxes du printemps...
Jean Giono aurait, pour parler de cela, évoqué la "rondeur du monde" ; un monde fait de courbes, de cercles, d'entrelacs, de spirales, d'arabesques ; un monde fait pour épouser et étreindre, pour être épousé et étreint...
Ondulations des herbes, ondulations des flots, ondulations des corps... Une "cosmunion" pleine et entière...
Un poème d'eau, de feu, de souffles et de chair.... là en ce "Penn ar Bed" Armoricain où tout finit et recommence...