Les dits du corbeau noir

PROMENADE LE LONG DU GOUET  PHOTOS BRAN DU

Marcher... avec Thoreau (Extraits)

Henry Thoreau « Désobéir » 10/18 éditeur

« ...Mon compagnon et moi, car il m'arrive d'avoir un compagnon, nous prenons plaisir à nous imaginer chevaliers d'un ordre nouveau ou plutôt d'un ordre ancien qui ne serait pas un ordre équestre de chevaliers, d'écuyers ou de cavaliers, mais de Marcheurs, confrérie que je tiens pour plus ancienne et plus honorable encore.

L'esprit chevaleresque et héroïque qui était jadis l'apanage du chevalier semble être désormais celui du marcheur ou tout au moins avoir survécu chez lui ; je veux parler non pas du Chevalier errant , mais du marcheur errant... »

...Si vous voulez de l'exercice, partez donc en quête des sources de la vie...

...Le remède naturel est à trouver dans ce que la nuit à de proportionnel au jour, l'hiver à l'été, la pensée à l'expérience. De la sorte, il y aura d'autant plus d'air et de soleils dans nos pensées...

…. Je m'inquiète lorsque , après avoir parcouru un mile dans les bois, je n'y suis pas encore parvenu en esprit...

...Je suis en dehors de mes sens. Or, pendant mes marches, j'aimerais leur revenir. Qu'ais-je à faire dans les bois si je me préoccupe de quelques chose qui leur est extérieur ?...

...S'il pouvait se trouver un peuple pour brûler les clôtures et laisser la forêt en paix !...

...Je marche dans une forêt qui est celle que fréquentaient les anciens prophètes et les poètes...

...Je crois qu'il existe dans la nature un subtil magnétisme qui, si nous nous en remettons à lui sans y songer, nous indiquera la bonne voie... Il n'est pas indifférent de prendre tel ou tel itinéraire. Il y en a un qui est le bon, mais, soit par négligence, soit par bêtise, nous sommes souvent enclins à choisir le mauvais.

Assurément nous aimerions emprunter dans ce monde-ci un chemin que nous n'avons encore jamais pris et qui soit le parfait symbole du sentier que nous aimons parcourir dans le monde intérieur idéal. Nul doute que nous éprouvions parfois de la difficulté à choisir notre direction car elle n'existe pas encore clairement dans notre esprit...

De l'Ouest :

C'est dans cette direction que se trouve pour moi le futur et, de ce côté, le monde me semble plus riche, inépuisé. Et je puis dire que l'humanité avance d'Est en Ouest... Nous allons vers l'Ouest comme on va vers le futur, dans un esprit d'entreprise et d'aventure...

Chaque coucher de soleil que je contemple m'inspire d'aller vers un Ouest aussi éloigné que celui dans lequel plonge le soleil...

L'île de l'Atlantide, les îles et les jardins des Hespérides semblent avoir constitué le Grand Ouest des Anciens, tout enveloppé de mystères et de poésie...

Qui, en regardant le ciel au moment du coucher du soleil, n'a vu en imagination les jardins des Hespérides et l'origine de toutes ces légendes ?

La lumière viens de l'Orient et le fruit de l'Occident...

...Il est trop tard pour apprendre l'Hébreu, comprendre même l'argot du jour est bien plus important...

...L'Ouest dont je parle n'est qu'un synonyme du terme « sauvage » et ce vers quoi tendent mes développements, c'est l'affirmation de ce que la sauvegarde du monde réside dans cette nature sauvage...

...De la forêt et de la nature à l'état sauvage proviennent les toniques et les écorces qui revigorent l'humanité...

Je crois en la forêt, en la prairie et en la nuit qui voit pousser le grain. Nous avons besoin d'une infusion de sapin-ciguë ou d'arbre de vie dans notre thé...

...Ce qui est sauvage s'accorde avec la vie et le plus vivant est aussi le plus sauvage...

...Pour ce qui me concerne, ni l'espoir ni l'avenir ne se trouvent dans les pelouses et les champs cultivés, dans les villages ou dans les villes, mais plutôt dans le marécage impénétrables et mouvants...

...Lorsque je cherche du loisir, je me mets en quête du bois le plus sombre, du marécage le plus dense, le plus interminable et, aux yeux du citadin le plus désolé. J'y pénètre comme dans un lieu saint, un sanctum sanctorum...

C'est là que se trouve la vigueur, la moelle de la nature. La forêt sauvage recouvre le terrain vierge et le même sol convient aux hommes et aux arbres...

...Il y a peu à attendre d'une nation lorsque l'humus est épuisé et qu'elle se voit contrainte d'utiliser les ossements de ses ancêtres pour engraisser le sol...

C'est tout ce qu'il y a de pensées sauvages, libre, non civilisée qui nous réjouit dans Hamlet, dans l'Iliade, dans toutes les Ecritures et les Mythologies, toutes choses qu'on n'apprend pas à l'école...

...Où se trouve la littérature qui donnerait la parole à la Nature . Serait poète celui qui pourrait enrôler à son service vents et cours d'eau afin qu'ils parlent pour lui ; celui qui saurait clouer les mots sur leur sens primitifs...

Celui qui ferait dériver ses mots chaque fois qu'il s'en servirait et qui les transplanterait sur sa page avec encore de la terre collée o leurs racines. Il faudrait que les mots qu'ils emploie soient si vrais, si frais et si naturels qu'ils sembleraient enfler comme les bourgeons et portent des fruits tous les ans, chacun selon son espèce, pour le fidèle lecteur, en symbiose avec la nature environnante...

...La Mythologie est la récolte que porta l'Ancien Monde avant que son sol ne fut épuisé, avant qu'un fléau semblable à celui des moissons n'affectât la fantaisie et l'imagination, en symbiose avec la nature environnante...

...La perdrix aime les pois, mais pas ceux qui l'accompagnent dans la casserole...

...Qu'on me donne pour amis et voisins des sauvages et non des êtres domestiqués...

… Nul dote que les hommes ne présentent pas les m^mes dispositions pour être civilisés, et si la majorité d'entre eux peut s'apprivoiser comme les chiens et les moutons par prédisposition héréditaire, ce n'est pas une raison pour que les autres voient briser leur nature afin qu'on puisse les réduire au même niveau..

...Le sommet le plus élevé que nous puissions atteindre n'est pas le Savoir, mais la Sympathie avec l'Intelligence...

...Nos pensées ailées sont devenues des volailles...

...Nous marchons dans une lumière si pure et si claire, dorant l'herbe et les feuilles sèches, une clarté tellement douce et sereine que je pensais ne m'être baigné dans un tel flot d'or, sans le moindre murmure ni la moindre ride à sa surface. Le versant occidental de chaque bois et de chaque élévation de terrain luisait comme le seuil de l’Élysée et le soleil dans notre dos semblait être un berger aimable qui, le soir venu, nous reconduirait chez nous. »..

Histoire naturelle du Massachusett (extraits) 10/18 éditeur

« Il ne faut pas chercher la santé dans la société, mais dans la nature...

De fait, la nature semble malade à celui qui l'est aussi...

Les théories du désespoir, de la tyrannie et de la servitude spirituelle ou politique, ne furent jamais enseignées par des hommes qui partageaient la sérénité de la nature...

Ces sectes sédentaires n'ont-elles rien de mieux à faire que de préparer des suaires et de rédiger des épitaphes pour les autres qui sont, eux bien vivants et plein d'activités ?

Il est évident que la joie est la condition même de l'existence...

Toutes les vanités qui affectent le monde ne peuvent modifier d'un pouce la mesure que la nuit s'est choisie...

Au contact de la nature, il semble que les actions humaines soient les plus naturelles car elles s'accordent si aimablement avec elle...

« C'est ici que d'année en année enseignait la Nature, quand seuls les Peaux-rouges venaient l'écouter... »

Le plus amical des hommes sera celui qui possédera au plus haut point la sagesse indienne...

Lorsque je marche dans les bois, je me souviens qu'un sage pourvoyeur y fut avant moi. J'y trouve symboliquement jusqu'à ma plus délicate expérience. Je suis frappé par les douces amitiés et les harmonies qu'on rencontre dans la nature... Il est aisé de rendre compte des elfes et des fées, ils incarnent cette grâce légère, cette noblesse éthérée....

D H THOREAU La Vie Sans Principe (extraits) Désobéir 10/18 éditeur

« … Travailler : j'estime qu'il n'existe rien de plus opposé à la poésie, à la philosophie, que dis-je à la vie elle-même que cette incessante activité, pas même le crime...

...On vous paie pour être moins qu'un homme...

...Il n'est pas d'individus plus fatalement malavisé que celui qui consume la plus grande partie de sa vie à la gagner...

...C'est avec amour qu'il faut gagner sa vie...

...La façon dont la plupart des hommes gagnent leur subsistance, c'est-à-dire vivent, n'est que pis-aller et manière d'éluder la véritable affaire de l'existence : et cela est dû pour l'essentiel à un manque de jugement mais, aussi en partie, à la médiocrité de leurs projets...

...La philosophie, la poésie et la religion de ce genre d'humanité n'atteignent pas en valeur la poussière d'une vesse-de-loup...

… La conclusion de tout cela sera que l'humanité finira par se pendre à un arbre...    Est-ce donc tout l'enseignement que les hommes ont retenu de tous les livres sacrés ?...

A propos des chercheurs d'or (fossoyeurs de leur propre existence.) :

...Avec encore devant les yeux la vision de ces mines, je me demandai pourquoi je ne pourrai pas moi aussi tamiser chaque jour un peu d'or, même s'il ne devait s'agir que des plus infimes paillettes, pourquoi je ne pourrais pas également creuser un puits d'extraction pour atteindre l'or que je recèle en moi et exploiter ce gisement là ? …