Les dits du corbeau noir

MARIE NOEL POETESSE (LA QUESTION SPIRITUELLE) EXTRAIS ET PENSEES INSPIREES PAR L'OEUVRE BRAN DU 2016 16 09 SEPT

A propos de Marie Noëlle Bran du Sept 2016

 

Un grand merci à Huguette Lasalle qui, jeudi soir en la galerie de Christian Tual et Martine Jardin, nous a gratifiés d'un magnifique et poignant récital constitué d'extraits choisis parmi les « Notes Intimes » de la poétesse Marie Noël... (L'émotion produite par la récitante survient quand ce qui « porte voix », « porte cœur ! )...

 

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Pensées inspirées en résonance et écho...

Bran du 15 et 16 09 2016

 

«(Sous forme « d'aphorismes et périls ! »...)

 

L'Extrême "lucidité" n'est-elle pas un don tragique donné à celui ou à celle qui fait existence d'interroger Dieu ne trouvant pas en d'autres temps et espaces qui interpeller d'autre ?

 

Car celui-là apprend à se tenir, comme il peut, dans la fragile et vacillante lumière alors que l'aveuglement ou l'éblouissement ne cessent de border ses pas tantôt hésitants, tantôt porteurs d'un joyeux élan !...

 

Interroger dieu n'est-ce pas lui poser d'incessantes questions et lui prêter d'hasardeuses réponses ?...

 

La solitude est l'ombre qui se complaît dans la lumière qui la fait naître et qui l'entretient... Qui peut dire qu'il peut éviter ou ignorer ses débordements ?

 

L'espérance, nous le savons, s'accroche à une étoile, mais il est des nuits si sombres, si couvertes et si longues qu'on en est amené à lâcher les rênes de l'attelage !...

 

Dieu est un chat qui peut ronronner, dans sa rondeur d'aise, sur les genoux patients et accueillants d'une hivernale solitude...

Les caresses sont les bienvenues ; l'espoir s'en arrondit le dos !...

 

A force d'attendre l'Amour, de laisser portes et fenêtres grandes ouvertes, de mettre nappe blanche et bouquet printanier pour le recevoir à la table d'hôtes, de revêtir, à cet effet, ses plus beaux atours, il arrive que la mort se présente chargée de milles excuses de la part d'un prétendant bien trop sollicité par ailleurs !...

 

Segalen, Victor de son prénom, affirmait aussi qu'il n'était né que pour vagabonder au monde... Heureux ou heureuse en effet, celui ou celle qui, en ses rivages, nus et offerts, mit volontairement " à découvert", sait que la vague abonde !

 

Lorsque, placé au mitan d'un dilemme conséquent, écartelé donc entre une position et son irrémédiable contraire, nous devons faire un choix décisif avec les engagements conséquents qu'il entraîne, nous n'avons de ressource que de trancher, mais en tranchant nous ne faisons jamais que séparer provisoirement un problème en deux en sachant que l'Hydre de nos problématiques existentielles ne tardera pas à retrouver son unité !...

 

« Il était une Foi » est un conte pour « hâter »... la venue de la mort !...

 

Croire ce n'est pas crucifier l'autre, c'est l'aider à ôter ses épines, sa croix et ses clous !

 

Le poème fut son amant, ses chansons une couche d'amour...

Mais si froid était le lit et si absents les bras qui entourent !...

 

Ce qui est beau et émouvant, ce n'est pas de faire éclore sur la branche du jour le plus beau des chants d'amour, c'est de faire du seul silence le chant qui le portera à nos entendements...

 

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Lamentations, d'un vieux pommier...

 

J'étais jeune et vaillant, élancé sur mes fougueuses racines...

J'avais humus nourriciers, vents avenants et saisons doucereuses...

Ramifié au ciel et bien ancré dans la terre, j’eus belle croissance

et branches nouvelles et vigoureuses...

Ainsi furent mes jeunes années...

 

Mais, celles-ci passant... point de fleurs, point de pommes au pommier !

 

Toutes branches tendues dans l'espérance du ciel,

j'attendis, éperdu, en ma verte ramure, la danse des abeilles...

 

Au fermier, je donnais toute l'ombre d'un bon repos et aux amoureux le couvert que demandaient leurs yeux...

 

Dans ma désespérance me fut octroyé un rayon de soleil

celui qui les oiseaux tissent de leurs chants et qui font de la vie une heureuse corbeille...

 

Sur mes rameaux stériles défilaient les hivers,

mais point ne ployaient les branches de mes automnes...

 

Une grive ensemença mon écorce d'un germe de gui

et celui-ci depuis s'enroule à mes âges...
Le lierre est venu aussi alors que me guette la clématite sauvage...

 

Ainsi il en est de certains pommiers comme de certains hommes...

Tous n'ont pas reçu de l'Amour et de la vie, la greffe qui porte fruits, la branche qui porte pommes !...

 

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Le cri comme une lave rouge et incendiaire ; le cri éructant sa pierre de colère... Le cri, sa lance, sa volonté de pourfendre...

Le cri là, figé depuis si longtemps, dans le noir de ses cendres !...

 

Elle était de cette étoffe soumise aux déchirures et aux accrocs,

mais tout l'amour dont elle était (-) issue transformait en blanche robe de noces, ses plus noirs oripeaux...

 

Le doute a, sans doute, été inventé pour nuancer les certitudes, quoi que ….

 

Vous m'avez mille fois déshabillée, alors que j'étais déjà nue

sous le couvert transparent de mon cœur...

 

Faire comme si on ne savait pas, faire semblant ; c'est une façon de survivre ; une façon d'entretenir une espérance... mais « faire semblant » alors que tout le monde sait que le sang est rouge !...

 

« Quel sera le premier mot de l'immortalité ? » nous demandait-elle … Le premier mot sera un souffle, une simple respiration délivrée du besoin de dire, de nommer, de signifier et de formuler !...

 

Il faut ne plus avoir peur de la mort ni du cimetière, pour vivre enfin « sans concession » !...

 

L'humour ; entre profondeur et élévation, entre montagne et vallée...

C'est un sentier de mule ou d'âne qui serpente a à flanc de coteau ; c'est le plus fragile, mais aussi le plus sûr chemin, qui nous conduit de l'humeur à l'amour...

 

Ce que l 'on sait de la neige, de son éblouissante pureté ; c'est qu'elle finira par fondre pour rejoindre l'océan de nos interrogations et de nos entendements...

 

Seigneur, si vous saviez, combien, pour vous, j'ai durablement saigné !...

« - Vous le savez bien... Je n'ai rien, absolument plus rien, plus rien à offrir, de tout, je suis dépossédé ;je suis nu, plus nu que la pierre roulée au sable fin...

- Donne ! Ta nudité est ma plus précieuse étoffe !...

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Depuis des siècles, depuis des dizaines de générations, ils se transmettaient les clefs précieuses du Royaume...

Personne n'osa leur dire que le Royaume n'avait ni porte ni serrure !...

 

Oui, bien sûr, le désir inexaucé...

Oui, bien certainement, la semence qui n'a pas germée...

Oui, bien entendu, le foyer et l'âtre sans feu ni flamme...

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Mais, dans l'âme réalisée, le désir peut contempler l'arbre ensemencé et la danse des flammes !...

 

Cela qui tresse, assemble, tisse les fils de nos emprisonnements,

le poème le détricote nuitamment, le défait secrètement....

 

C'était une fée toute de rose vêtue...
Cela déplut... à la Fée Roce !...

 

L'espérance se projette toujours dans le lointain...

Parfois il arrive qu'un arc-en-ciel vienne à notre rencontre !...

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A Marie Noël           Bran du             17 09 2016

 



 

La lutte fut âpre et le combat bien rude

 

Il fallut tout donné même ce que l'on ne possédait pas...

 

La solitude exigeait un peu de complétude,

 

mais de l'absence faisait son bien maigre repas...

 



 

Alors on se sent vide, plus vide encore quand se creusent les rides, quand le corps à de plus en plus froid...
ni ami, ni chien, ni chat, il n'est que douleurs sournoises et pensées perfides... 

 



 

L'attendu ne viendra pas,

 

l'attendu ne viendra plus...

 

Le cœur en a fait le terrible constat ;

 

Le deuil de la joie, lui, n'a pas attendu

 

Qui porte déjà le noir d'un blanc non venu...

 



 

Alors on fait recours au poème qui fait du bien ;

 

on le caresse comme un bon chien...

 

A soi-même on tient discours, on s'invente un doux lien,

 

avec des mots on l'entretient, on fait lumière sous l'abat-jour !

 



 

On sait, on sait depuis toujours

 

Qu'il n'est printemps en nos saisons ;

 

que seule la mort fera moisson

 

de nos hirondelles sans retour...

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Notes et avis de diverses provenances sur Marie-Noël :

« Une vie toute intérieure, dominée par un grand amour regretté avant d'avoir été vécu, flétri avant d'avoir fleuri...

Une intimité avec le Dieu absent autorisant des cris de l'âme qui ressemble à des blasphèmes. Si humaine, si pathétiquement humaine. » Y-a-t-il jamais un tel écart entre la grandeur du génie et la modestie de la personne à qui il fut accordé ? »

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Pourquoi cette beauté née de contrastes, entre fantaisie joueuse ou humour corrosif, interrogations tragiques ou recueillement de prières qui s'élèvent vers le sublime ? Pourquoi une pensée visionnaire qui expose sa foi ardente au questionnement impitoyable de la raison ? Pourquoi cette alliance de gaieté franche et de multiples déchirements ?Parce que son auteur demeure une « énigme »...

Elle embrasse la complexité d'une vie spirituelle, dans laquelle l'expression du doute et non seulement tolérée, mais peut être constitutive d'une foi authentique. »

Jeanne Marie Baude (Marie Noël. Notes intimes.).

 

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Marie-Noël : Une vie en lisière du bonheur des autres...

(Citations diverses.)...

 

« Parfois j'ai tellement besoin d'un ami, que je l'invente. »

 

"Tous meurent, nul ne sait mourir..."...

 

"Mort et vie ne sont que l'endroit ou l'envers d'une même trame."

 

"J'ai suivi à la fois toutes mes routes, tantôt de terre, tantôt de ciel et je n'ai fait que vagabonder entre la terre et le ciel."

 

"Moi, j'ai mon jardin ailleurs où sont mes fleurs et mes herbes.... et tous mes oiseaux..."

 

« Connais-moi si tu peux, ô passant, connais-moi !

Je suis ce que tu crois et suis tout le contraire !

La poussière sans nom que ton pieds foule à terre,

Et l'étoile sans nom qui peut guider ta foi.

Connais-moi, si tu peux, le pourras-tu ?

Tu le sauras si rien qu'un seul instant tu m'aimes ! »

 

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« Donne de quoi chanter à moi pauvre poète,

pour les gens pressés qui vont, viennent, vont

Et qui n'ont pas le temps d'entendre dans leur tête

les airs que la vie et la mort y font. »

Les Chansons et les heures

 

« Aimez-moi... hâtez-vous... j'entends le temps qui passe... »

 

« Donnez-moi du bonheur, s'il faut que je le chante... »

 

"Je suis un pommier qui offre ses pommes, les pommes tombées à terre ; ce n'est pas important."

 

"Je crois, très bas, à la haute bonté humaine, qu'on ne comprend pas."

 

"J'ai donné de mon mieux à tous le peu que j'avais et de toutes sortes de gens, beaucoup, j'ai reçu"...

 

"Me faut-il renoncer à mon esprit ."

 

« Il y a dans le catholique un être satisfait, supérieur, celui qui possède la vérité – plein de sécurité et de certitude. C'est en quoi je suis mal catholique. »...

"Avais-je bien la foi"...

« Je ne connais plus ni dieu, ni maître »..

 

« Opter pour la bienveillance infinie... »


"L'écriture, par les jours mauvais, me purge."...

 

"Un catholique donne, il ne reçoit pas..."

 

"Mon coeur , je n'en parle pas, je le tais ou je le chante."

 

"Il n'y a pas d'oeuvres d'art sans la maîtrise de l'Esprit."

 

"J'ai cherché un pays pour vivre, j'ai beaucoup marché, je vieillis, je ne l'ai pas trouvé encore."...

"Je cherche un pays pour mourir."...

 

"Je n'ai jamais cessé de trembler comme une chandelle vacillante entre deux mondes."

 

"L'instant vient où la grâce de l'ami lui sera et nous sera rendue."

 

"Serrée de près par les devoirs, je n'ai eu que Dieu pour espace."

"Dieu voyait pour moi plus grand que moi. Il ne m'a pas permis de m'installer sur terre. Il m'a forcée à avoir besoin du ciel." ...

Noces intimes"... 1978

 

« Je vous ai aimé, vous seul, parce que je ne pouvais pas m'en empêcher malgré le mal que vous aimer m'a fait. Je vous ai aimé sans voir, sans savoir, sans vouloir, sans pouvoir... »

 

« Le plus beau chant est celui qui contient le plus beau silence. »

 

« Toute la valeur de l'homme est dans sa recherche, son appel, son désir... »

 

« Je fais le plus de choses que je peux par amour pour me reposer d'en faire tant par nécessité .»

 

« L'homme.... peu à peu s'éteint, s'enfonce, se noie dans l'ombre, avant d'abandonner l'âme sur la route que nul ne sait, au chemin qu'elle prend sans lui. »

 

« L'histoire de ma vie, c'est l'histoire de mon âme. »...

 

« Mais, est-ce bien la peine, mon dieu, d'avoir une âme ? »

 

« Celui qui n'a besoin de rien, tout lui manque. »

 

« Tout est perdu de moi qui n'étais rien qu'aimante.... »

 

Elle a attendu plus de 75 ans pour se résigner à confier lors d'un entretien et pour faire connaître, en partie, ses Notes intimes, (œuvre classée comme œuvre de spiritualité ou « notes de voyage spirituel »), car elle souhaitait que ces « confidences » demeurent « secrètes »...

Notes intimes paraîtra, 8 ans avant sa mort, en 1959 chez Stock...

 

« Je voudrais retrouver le pays natal de mapoésie, le nid perdu de ma chanson, la contrée sauvage d'où elle m'est venue, de si loin, avec ses songes, ses épouvantes, sa plainte mélancolique, de frémissement de grande solitude qui me mêle toute aux arbres, les plus tourmentés, aux landes les plus hantées de signes et de présages... »

 

« L'Etre et l'amour s'oppose en l'homme. Non en Dieu. »

Pour travailler à son âme, l'homme a besoin d'un ange ? Il a aussi besoin d'un démon. »...

 

« Le monde, mouvement éternel d'un dieu brisé qui tend à se ré-unir. Le monde, unité rompue dont l'amour essaye de rassembler les morceaux. »

 

« AVOIR n'est qu'élargissement d'ETRE »...

 

« Que de fois la poésie est montée en moi comme une eau bouillonnante qui voulait rompre la pierre de sa fontaine close. »

 

« Les âmes les meilleures, les plus nourricières, sont faites de quelques grandes bontés rayonnantes et de mille petites misères obscures dont s'alimentent parfois leur bontés comme le blé qui vit de la pourriture du sol. »

 

« L'amour... une source qui a soif... parfois une fontaine sauvage, perdue dans un lieu sans accès, qui coule inutilement nuit et jour pendant des années... des années... des années pour qu'une seule fois – et peut-être pas même une seule – un passant viennent y boire une gorgée et s'éloigne. »

 

« Il faut le don de l'homme. Sans réserve. »...

 

« Je me suis prodiguée en offrandes contradictoires. »

 

« L'amour passa ma porte, sans daigner s'arrêter. »...

 

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Voir la « Neige qui brûle » livre bibliographique sur Marie-Noël ; ouvrage de Raymond Escholier.



16/09/2016